Bye, bye! On se retire. On range à la sauvette. On débranche l’ordi. On ferme les portes et les rideaux. On boucle les valises. On quitte la ville et on se retire à la campagne.
Là-bas
Je suis une fille de deux horizons et « d’entre-deux ». J’aime les « entre saisons » : l’automne et le printemps. Autant j’aime être près de la ville, autant j’ai besoin de grand air et de forêts denses. Chaque année, c’est la même chose. Quand tout reverdit, l’appel du bois se fait entendre. Une fois la maison en ordre, j’ai des fourmis dans les jambes et je rêve de partir pour mon camping. Loin de tout...
Camping est un bien grand mot. C’est plutôt un rassemblement de six roulottes installées sur la terre où ma mère est née dans un coin reculé de la Beauce. Trois heures de route, dont une dans des chemins de campagne, et nous voilà dans notre havre de paix. Là-bas, pas d’eau chaude dans les robinets, on se fie sur les sources naturelles et un système d’aqueduc « fait maison ». Pas d’électricité, donc pas de télévision, ni d’ordinateur, ni de four à micro-ondes ou de réfrigérateur central. On cuisine sur un poêle à bois doté d’une grande plaque de cuisson où cuisent les meilleures rôties du monde. Je n’apporte dans mes bagages que des vêtements confos et que des objets de plaisir : livres, tricot, cahiers de notes, revues et jeux de société. Là-bas, pas de frime, on joue franc-jeu. On est tous soi-même. On est simplement bien. On déjeune tranquillement en se berçant au coin du feu. On dîne et soupe en famille – souvent plus de douze à la table – et même la vaisselle se fait dans le rire et la bonne humeur. La belle vie…
Là-bas, dans la pénombre de la nuit, on n’entend rien. Pas même le ronronnement du frigo, c’est complètement génial. On se « déconnecte » complètement de notre rythme fou de la ville pour se brancher sur un mode de vie beaucoup plus calme et apaisant. On y retourne avec plaisir et avec une « hâte » avouée. C’est viscéral ce besoin de tout laisser derrière pour aller prendre le pouls de la vraie nature. Là-bas, je remets ma pendule à l’heure. J’y prends les décisions les plus éclairées sur ma vie. Au grand air, il est possible de me recueillir et me ressourcer. Libérateur, créatif et inspirant comme endroit. En un mot, pour moi, il est magique.
Aller au village – à 15 minutes en voiture - acheter les journaux prend des airs de grandes sorties. Là, je me sens libre et bien comme à aucun autre endroit sur Terre. Et pour mon plus grand bonheur, ma fille s’y plaît énormément. Son terrain de jeux est immense; en fait, il n’a plus de limites. Elle observe les animaux, cueille les fraises des champs (ou les pommes selon la saison), fait de beaux bouquets odoriférants, part à la chasse à la sauterelle, regarde l’eau du petit ruisseau, ramasse dix cailloux, corde le bois et s’invente mille jeux. Elle ressent bien que là-bas, nous sommes dix fois plus calmes et il y a toujours quelqu’un pour l’amener découvrir quelque chose.
Cet été, nos projets sont un peu perturbés. Habitués d’y aller presque chaque week-end en plus de quelques semaines entières durant la belle saison, il faudra se restreindre avant l’arrivée de mini-fiston. Mais dès qu’il sera là et que la température sera douce, on y retourne. Nous avons tous hâte de lui faire découvrir le grand air et la nature. Surtout que depuis que je le porte au creux de moi, j’ai tout de suite associé sa naissance à l’appel de la nature. J’ai décoré sa chambre en ayant en tête la couleur des écorces d’arbres et le vert éclatant des feuilles encore parsemées de rosée du matin. Cet automne, nous quitterons encore le nid familial semi-urbain pour nous cacher dans le bois avec un petit homme qui aura la chance de sentir l’air frais et parfumé de la campagne au lieu de rester enfermé en ville. J’aime m’imaginer qu’ainsi, il prendra des forces et des couleurs pour la saison plus froide… avant d’y revenir l’an prochain pour - qui sait? - faire ses premiers là-bas.
Lui aussi...
Si je me retire au fond des bois, mini-fiston se recueille lui aussi à sa façon. Je le sens beaucoup moins qu’il y a un mois. Nos rendez-vous sont plus espacés. Il se prépare, je le sens. Je le sais. Et de mon côté, je fais la même chose. Une grande aventure nous attend : sa naissance. C’est lui le maître d’œuvre, mais je me dois d’être prête pour l’aider. On fera équipe ensemble, se tenant la main pour la première fois.
Bien sûr, le manque de place flagrant (je ne suis définitivement pas assez grande et longue pour qu’il se sente à l’aise complètement) et sa taille qui ne cesse de pousser engendrent certains inconforts. De mon côté, je bouge énormément en dormant réclamant souvent tout le lit pour me trouver vraiment confortable. De son côté, il me donne de vigoureux coups de pieds aux allures moins romantiques que directrices : je manque de place! N’aie crainte, bébé, bientôt, on sera mieux… tous les deux!
Hoquet? Non, hockey…
Ce petit fiston n’est même pas né que tout le monde se donne le mot pour lui parler de sports. Son papa rêve de lui expliquer les règles de football et les stratégies du hockey. Probablement qu’il souhaite faire équipe avec lui, secrètement, pour le pool de la prochaine saison sans me l’avouer… Et voilà que Miss Lulus en rajoute.
Un soir, toutes les deux bien collées devant la 100e représentation maison de Tarzan, je lui dis de poser sa main sur mon ventre pour sentir que le bébé a le hoquet. « Heiiiin!, qu’elle me lance aussitôt. Il joue au hockey dans ton ventre. Il est le gardien de but? » Décidément, elle n’y comprenait rien! Mon ventre était absolument trop petit pour contenir une patinoire (Soulagement quand même!). « Non ma jolie, pas du hockey, le hoquet! » Mine déçue, elle se retourne aussitôt vers Tarzan… l’air de se dire que le hoquet n’est pas surprenant ni original, alors que si je l’avais dérangée au moins pour lui dire qu’il jouait au hockey, ça aurait eu plus de bon sens.
D’accord Miss Beauté, rejoins ton homme-singe, moi je vais me saouler encore un peu des dernières sensations que je perçois… À chacune nos émerveillements!
Je prépare un livre
Comme moi, Adèle adore les livres et les histoires. Elle écoute un vieux CD de 4 contes de Fanfreluche trouvé dans un bazar chaque soir – ou presque! – depuis deux ans. Je lui fabrique, en secret, un livre de six pages qui lui expliquera ce qui va se passer quand son « bébé nouveau » va arriver. Six tableaux simples avec des photos de nous. Le départ avec nos valises, l’arrivée chez ses grands-parents, papa et maman à l’hôpital, Adèle qui joue avec ses grands-parents, notre appel pour lui annoncer que le bébé est arrivé et sa visite à l’hôpital. Je sais qu’elle l’adorera, car ce livre la rassurera. Sa dernière question ces temps-ci est « Pourquoi NOUS on va avoir un bébé? ». Par chance, j’ai trouvé ma réponse : parce que les enfants sont les plus belles histoires d'amour de leurs parents, ma belle minounette!
Bonne semaine!
35e semaine