C'est ce qui est raconté dans un article de Libération.
Si ces traumas subis par les enfants ont tendance à se répéter au fil des générations, c’est qu’ils laissent des séquelles importantes sur les survivants, même à l’âge adulte.
Le calvaire des victimes de traumatismes vécus pendant l’enfance ne s’arrête pas après les violences. Les cas reconnus laissent des marques difficiles à effacer, ou même à oublier. Violences émotionnelles ou physiques, abus sexuels, abandon parental, violences conjugales vues par les enfants, humiliations verbales… La liste des traumatismes subis par les enfants est longue et se rallonge car on reconnaît progressivement leur impact sur les tous petits. Ainsi, ceux qui assistent aux mauvais traitements subis par leur frère ou leur sœur sont désormais pris en compte.
Cela commence dès la petite enfance. Le CHU Sainte-Justine prévient par exemple des effets négatifs causés par le syndrome du bébé secoué (SBS). Des nourrissons victimes de telles secousses, alors qu’ils sont fragiles, peuvent souffrir de séquelles, parfois permanentes : troubles du sommeil, troubles de l’alimentation, épilepsie, paralysie et cécité, pour n’en citer que quelques-unes. Et quand ces victimes ne montrent pas de maux visibles, elles peuvent tout de même souffrir de troubles de l’apprentissage ou de socialisation.
Des expériences qui affectent les relations sociales
Natacha Godbout, psychologue et professeure au Département de sexologie à l’UQAM, a consacré plusieurs travaux aux impacts relationnels de tels traumatismes à l’âge adulte, en particulier les abus sexuels. Plus les faits ont lieu en bas âge et se répètent, plus les séquelles sont lourdes et compliquent les rapports avec les autres personnes. Dans un article de l’UQAM, elle explique que les « survivants croient par exemple, qu’ils ne valent pas la peine d’être aimés ».
Si certains troubles ressentis par ces victimes correspondent au syndrome de stress post-traumatique (SSPT), elles montrent aussi une détresse émotionnelle, sur le plan relationnel. Ainsi, des problèmes d’attachement, le manque de confiance en soi ou en autrui compliquent leurs chances de construire et de s’épanouir dans une relation conjugale. Natacha Godbout observe également que des expériences de négligence peuvent conduire à des relations intimes chaotiques.
Les survivants font souvent recours à la dissociation, d’après les recherches de la psychologue. Ce phénomène variable peut s’exprimer de plusieurs façons, pour se prémunir des réalités trop difficiles à supporter. Parce que les évènements sont trop durs et trop brutaux, la personne se déconnecte d’elle-même et de son environnement. Cela explique pourquoi certaines personnes peuvent parler de ce qu’elles ont vécu sans rien ressentir, ou d’un air absent.
Cette stratégie semble rassurante mais perturbe grandement la santé mentale du survivant.
Des solutions pour guérir
Néanmoins, de telles conséquences ne sont pas une fatalité. Il existe des moyens pour aider les victimes de traumatismes subis pendant l’enfance à aller de l’avant.
Selon Natacha Godbout, il faut surtout que les survivants prennent conscience de ce qu’ils ont vécu en étant petits, et qu’ils le comprennent. La mentalisation est la clef. Il s’agit de se représenter les intentions qui motivent les actions et sentiments d’une personne, ou de soi-même. Comprendre l’acte subi et les raisons qui se cachent derrière est essentiel pour guérir. Cela permet de combattre la dépression et la dissociation, en se confrontant à la réalité et en la surmontant.
Guérir seul n’est pas non plus facile; être écouté et entouré est important. Donner du sens à ces évènements est moins difficile en parlant, avec un psychothérapeute par exemple. Il pourra aider la victime à comprendre ses émotions ressenties lors du traumatisme, et à les nommer. Il s’agit d’apprivoiser sa souffrance et « apprendre à la tolérer petit à petit », conclut la psychologue.
L’idéal reste la dénonciation de l’acte par l’enfant au moment où il le vit. Cela permet de lancer le processus de guérison plus rapidement, pour renouer une relation positive avec un adulte par la suite.
Par Julie Vanwynsberghe
À lire sur Planète F
Même plus la force de jouer
Sommes-nous de si mauvais parents?