C’est un moment privilégié qui me permet de voir mes enfants grandir, faire de belles photos et passer un moment de qualité. Cette année, je me suis « anormalement » réjoui, j’oserais dire, sans prendre en considération qu’il pourrait y avoir des grains de sable dans mon projet parfait. Et pourtant quelle ratée! Ma grande n’a fait que pleurer, râler, refuser, se rouler par terre : elle ne prenait aucun plaisir, et était d’humeur massacrante. Il a été difficile de surmonter ma déception, car j’avais vraiment envie de ce moment pour moi, mais aussi parce que la voir heureuse dans ce contexte m’aurait comblée et aurait conforté mon fantasme idéal.
J’ai donc pris un peu de recul, mental et physique. Je me suis écartée en respirant et en me recentrant sur le présent, ce que je pouvais faire avec la situation et comment prendre du plaisir avec les moyens que j’avais au moment où ça se passait. Évidemment, la journée n’a pas été celle dont je rêvais, mais j’ai réussi à réajuster ma perception du mieux que je pouvais pour garder de bons souvenirs et être sereine.
Je crois que dans l’excitation de vivre ce bon moment, je ne me suis pas dit une seule minute que pour elle ce n’était pas ce qu’elle voulait vivre à ce moment-là : la sieste avait été courte, son goûter n’était peut-être pas assez copieux, la route était trop longue, on était peut-être aussi trop actifs et dynamiques pour écouter ses propres besoins ou même les voir, bref, un cocktail d’incompréhensions mutuelles.
La leçon que je retiens est que tout d’abord c’était mon rêve, mon désir, et non le sien, donc je ne dois pas lui approprier des sensations ou des émotions, ni attendre d’elle des réactions alors que c’est mon propre ressenti. Aussi, pour protéger le moment, il faut diminuer ses attentes et resserrer les liens, on peut aussi déplacer dans le temps certaines activités ou les réessayer plus tard. Enfin, ce qui est primordial est de ne pas ressasser ni rester dans la rancune ou la frustration. Il faut essayer d’être positif et transformer cet événement pour mieux réagir, s’organiser la prochaine fois.
Je tâcherai de me réjouir raisonnablement (même si ce terme semble manquer de spontanéité), mais surtout de vivre l’instant et trouver le présent enrichissant. Vivre ensemble ce sont des concessions et des prises de risque. Cela compte dans toutes les sphères de notre vie : être trop dans le contrôle, même s’il s’agit d’un événement positif comporte toujours des difficultés et une zone floue. C’est beaucoup de pression pour les autres qui doivent être à la hauteur de nos espérances, et se tromper sur la réalité en oubliant de vivre en accumulant de la déception. Il faut éviter de transférer ses désirs pour être plus près du vrai et du réel.
Et aussi prendre conscience que nos besoins mutuels sont parfois en concurrence.
