Ce petit garçon appelé Jason avait pris une place importante dans notre vie avec ses longues nuits de douleur à son ventre due aux coliques et ses vomissements continuels qui ne cessaient pratiquement jamais. Quelle mère étais-je donc? Cette angoisse me hantait, j’avais cette peur de perdre mon petit trésor. J’ai donc décidé à ce moment, que ma vie serait consacrée à lui, c’est tout ce que je possédais de plus important pour moi. Chaque fois que je berçais cet amour, je ne pouvais m’empêcher de penser comment une maman peut ne pas prendre soin de son enfant et à cette idée, j’avais toujours des larmes.Ce puceron grandissait chaque jour, chaque petit moment était un cadeau et je ne voulais pas en manquer un seul. Je voulais voir tout de lui, comme son premier sourire, ses premiers mots, ses premiers pas.
Pour avoir la chance de vivre tous ses instants, j’avais décidé à cette époque d’abandonner douze années de métier de serveuse et de rester le plus près possible de mon fils, en me bâtissant une PME, c’est-à-dire une garderie en milieu familial. J’avais bâti, en septembre 2000, quelque chose de merveilleux pour les six petits enfants qui partageaient ma vie. Et de voir Jason grandir parmi eux était ce que la vie m’avait offert de plus beau. Le savoir à mes côtés me rassurait beaucoup. Mais malheureusement, ce paradis fut très vite aboli …
Un après-midi d’octobre, je balançais Jason dans sa balançoire dans ma cour, avec les autres petits enfants et je remarquais que Jason faisait des gestes bizarres quand il était en gravité, comme si quelque chose le coinçait. Je l’observais attentivement toute l’après-midi et à la fin de cette journée, je me suis précipitée à l’hôpital Sainte-Justine en expliquant au médecin ce que j’avais remarqué d’inhabituel chez lui.
Après une série de questions, on m’a dit que Jason se soumettrait immédiatement à un scanneur et que j’aurai les résultats le lendemain. Le lendemain n’a pas eu le temps d’arriver, ce fut le soir même qu’on m’annonça une rencontre officielle le lendemain matin avec des spécialistes et qu’il y avait quelque chose d’anormale au cerveau de Jason.
Imaginez la nuit… Moi et mon conjoint avions supposé des centaines d’hypothèses. Et la dernière qui est venue à l’esprit de mon conjoint a été : « Et si Jason avait une tumeur au cerveau? »Je l’ai regardé droit dans les yeux et je me suis mise à pleurer en lui disant que c’était horrible de penser une telle chose, que c’était impossible d’arriver à un petit trésor de dix-huit mois.
Cette journée du 17 octobre 2000, le diagnostic tombe. « Jason a une tumeur cérébrale, votre chambre est prête. Lundi matin nous devrons l’opérer, il devra subir une série de tests, l’opération est très risquée, nous ferons notre possible, mais il aura 25 % des chances de survivre ».
Tous ces mots en quelques minutes qui vous glacent le sang et qui crèvent votre cœur à jamais.
Après être restés un an et demi à l’hôpital pour de la chimiothérapie, nous avons vécu beaucoup d’émotions ensemble. Malgré tous les troubles physiques que cela a occasionnés à Jason, il est resté le plus fort de la famille, il voulait vivre et il avait une force de caractère incroyable. Après s’être battu contre la maladie, Jason est sorti gagnant, il est maintenant rendu à 5 ans. Il est à sa deuxième année de rémission depuis avril 2004. Il est soumis très étroitement tous les quatre mois à une série de tests qui se déroule bien jusqu’à aujourd’hui.
Mais après qu’advient-il du quotidien d’un enfant comme Jason à la suite de ces lourdes épreuves?
Je vous dirais que l’amour qui nous rend inséparables devient très intense. Au moindre départ, ça devient une insécurité incroyable pour lui et pour nous. Après avoir joué au professeur et avoir fait tous ses milliers de caprices, maman et papa doivent se retrouver.
Les « non » sont difficiles à vivre, comment peut-on lui dire « non » quand tout était permis avant? Je dirais qu’avec du recul, il faut considérer notre enfant comme un enfant normal. Lui faire comprendre avec beaucoup de patience qu’il y a des compromis dans la vie et qu’il faut négocier avec le tout.
Ces enfants deviennent rapidement des enfants rois. Jason est devenu un dominateur, il aime donner des ordres. Il agit en maître de la maison. Il voudrait tout posséder, le monde, les jouets, les sentiments, etc.
Et nous ses parents, nous surprotégeons ce petit être parce que nous voulons plus qu’il ne vive aucune souffrance et je dirais que c’est là que commence la discipline.
Parfois, même si nous ne voulons pas qu’il fasse telle chose, c’est tout simplement pour le ramener aux vraies valeurs de la vie.
Même si à l’occasion il doit être mis à l’écart pour réfléchir quelques minutes, ce n’est pas parce que nous ne l’aimons plus, c’est pour qu’il comprenne qu’il y a des conséquences aux gestes qu’il pose et qui doit être assumées jusqu’au bout.
Sur le plan affectif, je dirais qu’il est d’une fragilité incroyable et sur le plan intellectuel, il est plein de curiosité et d’enthousiasme pour apprendre. Sur le côté physique, c’est plus difficile, il va préférer plutôt des activités intellectuelles ou sportives. Je pense qu’il n’y a pas de livres magiques pour vivre avec un enfant comme le mien. Il suffit juste selon moi de lui montrer que nous le comprenons vraiment. Et c’est d’essayer de nous mettre à sa place et de voir le monde comme il le voit.
Donc, à mon avis, un garçon comme Jason a besoin de stabilité, de rituels et surtout des parents forts et pleins d’amour pour le guider. Finalement, la science et le bon sens peuvent vous dire une chose, alors que votre cœur vous en dit une autre. Alors, vous qui êtes une maman, écoutez ce que dit votre cœur!
Merci de m’avoir lu.
La maman de Jason,
Céline