Le rôle du parrain et de la marraine
C’est votre frère, votre belle-sœur, votre sœur, votre beau-frère. Ils reçoivent pour le poupon le cierge allumé au cierge pascal, signent son front d’une croix et apposent leur signature dans le grand livre, dans le cadre de la cérémonie du baptême qui précède un petit festin de viandes froides et gâteau. Au même moment, ils offriront à fiston ou fillette la joie d’ouvrir un cadeau… même si ce n’est pas sa fête. Puis l’enfant se délectera au cours de ses 18 prochains anniversaires d’un cadeau en surplus provenant de ces gentils donateurs, son parrain et sa marraine.
Voilà, en résumé la fonction de parrain ou de marraine en 2011 et ce à quoi elle ressemblait déjà beaucoup il y a 20 ans… Un rôle de guide dans la foi, qui fut réduit comme peau de chagrin au fil de l’empiètement de la société de consommation sur l’influence de la religion, signale Benoît-Marc Boyer, prêtre au Diocèse de Montréal. « Ils (les parrains et marraines) sont là pour aider les nouveaux baptisés à catéchiser leur Foi, à la faire grandir. Au début, dans la Bible, la Parole disait : ‘Allez de par le monde, annoncez Jésus-Christ et baptisez-les’. On a ainsi eu l’idée de demander aux baptisés de transmettre la parole et ils sont peu à peu devenus des parrains », relate-t-il.
Le parrain et la marraine représentent, aux yeux de la religion catholique, d’abord une extension de la famille – raison pour laquelle on choisit toujours un homme et une femme – et ensuite la vaste Église dans laquelle l’enfant va renaître, poursuit l’abbé Boyer.
Critères
Il faut d’ailleurs être soi-même baptisé, mais également avoir fait sa première communion et sa Confirmation et être âgé d’au moins 16 ans, pour se voir accorder la permission d’être parrain ou marraine, toutefois le lien de parenté avec l’enfant n’est pas obligatoire. « C’est ce qui nous confère la maturité chrétienne nécessaire », ajoute le prêtre en précisant qu’il n’est toutefois pas indispensable de se doter d’un parrain et d’une marraine pour faire baptiser son enfant, bien que cela soit préférable.
Conséquences légales
Il s’agit d’un rôle essentiellement religieux qui n’est pas inscrit dans la loi civile. Lors du décès soudain des parents avant que les enfants aient atteint la majorité, le parrain et la marraine ne deviennent donc pas les tuteurs légaux de leurs filleuls et filleules. C'est une disposition qu'il faut prévoir dans un testament et on peut désigner les personnes que l'on veut.
Cadeau
Comme la mission qui leur incombe est d’ordre religieux, il est fortement recommandé d’offrir aux parrain et marraine un présent à caractère religieux pour le baptême, souligne l’abbé Boyer. Au-delà de la petite cuiller d’argent que les trentenaires et les quarantaines ont reçu à l’époque où ils ont été eux-mêmes baptisés, « les magasins religieux regorgent de beaux objets, tels que des livres garnis de belles images religieuses », enchaîne-t-il.
Choisir parrain et marraine
C’est peut-être en raison de cette teinte religieuse que l’on déniche de plus en plus difficilement ceux qui s’empareront de ce rôle, ou plutôt en raison du fait que l’on semble davantage percevoir ces couleurs religieuses.
Il faut donc prendre cette quête au sérieux. D’abord, rassurez-vous, vous pouvez jeter votre dévolu sur votre sœur, même si elle est déjà marraine d’un autre neveu. On peut être parrain ou marraine de plus d’un enfant, tant que l’ampleur de la tâche ne nous empêche pas d’assumer nos responsabilités.
Votre cousin gai et son conjoint ne pourront toutefois être les parrains de votre enfant. « Comme l’homme et la femme se complètent, aux yeux de l’Église, on doit avoir un parrain et une marraine. On peut avoir seulement un parrain ou seulement une marraine, mais pas deux parrains ou deux marraines », explique l’abbé Boyer.
L'état matrimonial ne devrait pas constituer un frein à la possibilité de parrainer un enfant, poursuit le prêtre; une personne divorcée qui respecte les autres critères, incluant le fait de pouvoir « donner un témoignage de vie cohérent avec l’Évangile », peut devenir parrain ou marraine. Évidemment, cette exigence peut faire l’objet d’interprétations diverses, mais justement, il faut faire preuve de bon jugement lorsque vient le temps de choisir…
… car on ne peut virer son capot de bord; une fois que les noms sont inscrits au registre de la paroisse, on ne peut changer le parrain et la marraine.
Il faut donc savoir reconnaître qui, de nos frères et sœurs d’abord – puis hors la famille proche si ses rangs sont trop maigres – saura être le meilleur témoin de la Foi pour notre enfant. En assoyant son choix sur cette base, on pourra plus aisément le justifier auprès de ceux qui auront été « laissés de côté »…
Des alternatives?
Dans le Québec très croyant des années 50, le rôle du parrain et de la marraine était plus effacé, tant la religion était déjà très présente dans toutes les sphères de la vie, relate l’abbé Boyer. Aujourd’hui, ce rôle est davantage mis en lumière… sans être forcément bien joué! Car les croyances ont pâli. « Quand on demande le baptême pour nos enfants, il faudrait minimalement y croire », estime Chantal Dauray, auteure de Réinventez vos cérémonies, fêtes et rituels, paru aux éditions Stanké en 2004 et fondatrice du site nosrituels.com.
Selon elle, les parents optent aujourd’hui pour le baptême dans le respect de la tradition et comme on leur signale qu’il faut choisir parrain et marraine, ils se plient à cette exigence. Pourtant, rares sont les parents qui s’assurent que ces deux personnes-clés s’engagent à dévoiler à l’enfant la beauté de la vie chrétienne…
Il existe peut-être, entre l’indifférence et la déférence totale en Dieu, un juste milieu. Car comme l’indique le père Boyer, « Les parents veulent faire du baptême une fête pour présenter l’enfant à la famille, pour témoigner des valeurs humaines… » « Il existe des fêtes païennes pour souhaiter la bienvenue à bébé dans le monde », enchaîne Mme Dauray.
Et l’on peut même nommer un couple de parrain et marraine, poursuit-elle en précisant que ceux-ci joueront alors, pour l’enfant, le rôle de mentors, de guides, particulièrement aux moments-clés de sa vie. « Le fait de ne pas avoir remplacé ce rituel (le baptême) et bien d’autres rituels représente une grande perte à mon avis… », déplore-t-elle.