2 + 2 + 2 = …
12 : 4 = …
XdB = 10log10(P1/P0) = …
f = 15 x 3 f0 = 45 f0
16 2 32
Hmmm… Le cas se complique! Depuis des lunes, qu’on les aime ou non, qu’on les comprenne ou non, qu’on y excelle ou non, nous utilisons les mathématiques au quotidien, sans qu’on s’en rende toujours compte. Cependant, n’est-il pas étonnant de penser qu’il existe de nombreux concepts mathématiques à la base de l’organisation musicale générale? En effet, malgré le curieux contraste existant entre vibration, rêve, élan émotif et rigueur, organisation, précision, la musique repose bel et bien sur des fondements mathématiques. L’art et le raisonnement logique ne sont peut-être pas si loin l’un de l’autre, finalement! De ce fait, pourrions-nous supposer que l’apprentissage de la musique favoriserait celui des mathématiques? Ou vice versa? Voyons voir.
Nous avons déjà mentionné, dans un article précédent, que la musique pouvait contribuer au développement du langage chez l’enfant. Effectivement, chanter, apprendre à jouer d’un instrument ou écouter la musique activement permet d’éveiller la conscience phonologique et la reconnaissance des mots. L’enfant améliore son sens du rythme, acquiert une plus grande diversité de vocabulaire et affine sa coordination. Sans compter que l’attention, la concentration, la mémoire et l’écoute s’en trouvent enrichis.
Dans le même ordre d’idées, plusieurs chercheurs1 se sont intéressés à l’impact que peut avoir l’apprentissage de la musique sur l’acquisition et la maîtrise de connaissances mathématiques. De façon générale, il en ressort que différents éléments musicaux favorisent une meilleure compréhension des notions de fractions, par exemple. Habiletés cognitives, pensée abstraite, concepts de classification, numération, association et espace/temps semblent également être affectés de façon significativement positive lorsque l’enfant a reçu un enseignement musical2. D’après ces nombreuses études sur le sujet, la musique solidifierait les capacités de transferts des connaissances et stimulerait le développement des capacités cognitives des enfants.
Comment?
En termes simples, nous pouvons dire que les chiffres sont présents partout en musique. Un non-initié écoutant une douce mélodie ne peut s’imaginer tout le processus nécessaire à sa production. Il aura probablement fallu déchiffrer une partition, donc lire et reconnaître les notes, compter leur durée, le nombre de temps, les mesures que comporte la pièce, etc. Pour arriver à faire cela de manière fluide, le musicien se sera entraîné un bon moment et sa formation l’aura amené à comprendre que les notes possèdent leur hauteur propre et les figures de rythme, leur durée, et qu’il existe entre elles des relations bien précises. De ce fait, la ronde vaut deux blanches, la blanche elle-même vaut deux noires, cette noire vaut quant à elle deux croches et ainsi de suite. Les mesures peuvent compter deux, trois, quatre temps et ces temps peuvent être subdivisés…
Certains musiciens auront aussi recourt aux accords chiffrés : il y a déjà plusieurs années, à l’époque dite baroque (1600-1750), les compositeurs utilisaient le chiffrage d’accords afin de construire une basse continue, notation qui servait à décrire et à analyser leur travail dans son contexte musical. Les musiciens savaient interpréter cette notation et en jouant sur leur instrument, ils donnaient vie aux airs, sonates ou cantates imaginées et souhaitées par les compositeurs. Plus près de nous, ce sont principalement les musiciens populaires et jazz qui utilisent aujourd’hui le chiffrage pour indiquer les fonctions et donner un cadre à leur musique.
Exemple d’accords chiffrés :
De façon plus globale, les mathématiques occupent une place importante dans la structure et l’organisation de la musique et ce, à différents niveaux. Maints philosophes, penseurs et savants s’y sont intéressés au fil des siècles. Il faut retourner aussi loin qu’à l’époque de l’Antiquité, avec Pythagore, pour trouver les premiers énoncés sérieux à ce sujet, puis vinrent ensuite Zarlino, Galilée et Euler, pour ne nommer qu’eux.
Un peu d’histoire
À cette époque et pendant très longtemps, la musique fut considérée comme une science au même titre que la géométrie ou l’astronomie. En généralisant, on peut affirmer que c’est au philosophe Pythagore qu’on reconnaît la découverte du lien entre musique et science. Un jour, il constata qu’un forgeron frappant son enclume avec des marteaux de masse différente obtenait des sons différents. Les intervalles musicaux étaient en relation avec la masse des marteaux. Dès lors, Pythagore élaborait une théorie qui, après avoir subi quelques modifications au fil du temps, marquait déjà les assises de la notation musicale moderne. Il serait trop long et ardu de faire ici la démonstration de toutes les dimensions mathématiques existant dans la structure de la musique. Mentionnons tout de même que le son répond à des lois de la physique qui peuvent être représentées par des courbes et des équations. Ce son est une onde créée par vibration, faisant bouger l’air qui atteint par la suite l’oreille et le système auditif. La note, qui comporte une durée, une intensité, une hauteur et un timbre, est une courbe représentant la pression de l’air par rapport au temps. Tous ces éléments peuvent être illustrés par des formules bien précises, surtout basées sur les rapports de fréquences. D’ailleurs, l’oreille humaine est sensible à ces rapports de fréquences et non aux différences entre les fréquences.
À quoi ça sert?
Dans l’absolu, tous ces rapports et ces fractions permettent d’obtenir une musique structurée et harmonieuse. L’ajustement de la gamme en intervalles égaux a rendu possible le développement d’un système d’accordage des instruments, entre autres. Dans une optique plus pratico-pratique, cette compréhension de la nature du son a facilité le travail des ingénieurs et sonorisateurs. La technologie a permis de synthétiser les sons et les notes, créant ainsi des fréquences parfaites qui assurent une harmonie et une perception agréable pour l’oreille.
En somme, plus qu’une activité de loisir, la musique est réellement une source d’enseignements multiples. Les enfants comme les adultes en ressentent les bienfaits, qu’ils en aient fait l’apprentissage sur une courte ou sur une longue période. Le philosophe et mathématicien allemand Leibniz écrivait : « La musique est un exercice caché d’arithmétique, l’esprit n’ayant pas conscience qu’il est en train de compter ». Nombreux sont les compositeurs qui se sont intéressés aux mathématiques et s’en sont inspirés pour leurs compositions. Pensons à Jean-Philippe Rameau, Jean-Sébastien Bach ou encore Béla Bartók. Mais comme nous l’avons vu, les scientifiques ont également un attachement ou du moins une curiosité certaine pour le monde de la musique. Einstein n’était-il pas un excellent violoniste? Difficile de croire que de telles formules mathématiques puissent provoquer les émotions ressenties lorsqu’on écoute de la musique… et pourtant!
Références
- Rauscher, 1994, 1997, 1997 ; Schellenberg, Glenn, 2004 ; Bolduc, 2006 ; Ho et al., 2003 ; Bamberger, 2000 ; Mingat, Suchaut, 1994 ; Wetter and al., 2009 ; Lee et al., 2007.
- Lee, I. W. et S. J. Kim (2006), ‘’The effects of integrated activity with music and mathematics on musical ability and the mathematical concepts of preschoolers”, The Journal of Korea Open Association for Early Childhood Education, Vol. 11/2, pp. 305-329.