Gouvernement

La responsabilité civile des parents

Être poursuivi en justice pour les mauvais coups de vos enfants, c’est possible! Un jugement pourrait même être rendu directement contre vous, à titre de titulaire de l’autorité parentale. Voici comment et pourquoi.

Les exemples de cas où vos enfants peuvent causer des dommages à autrui sont nombreux et peuvent, à certaines conditions, entraîner votre propre responsabilité civile.

Prenons quelques exemples pour illustrer les mécanismes applicables.

Léonie, 12 ans, s’amuse avec des allumettes à proximité d’un bac de recyclage. Sans trop réfléchir aux conséquences de ses actes et en voulant impressionner son ami Léon, elle décide de jeter l’allumette dans le bac rempli de feuilles de papier et de carton. Un petit feu se déclenche dans le bac, mais elle ne s’inquiète pas particulièrement. Elle quitte les lieux et, quelques heures plus tard, remarque que l’immeuble voisin du bac de recyclage est incendié. L’immeuble est une perte totale.

Nathan, 8 ans, reproduit une image vue dans un film où un acteur frotte une clé sur la magnifique nouvelle voiture du voisin. Il en coûtera plusieurs milliers de dollars pour effectuer la réparation.

Frédérique, 9 ans, se bat dans la cour d’école et casse une dent à son camarade. La dent devra être remplacée par un implant.

Paiement des dommages

Qui paiera pour les dommages causés par l’enfant?

Pour les biens qui sont couverts par une police d’assurance (par exemple, un immeuble ou un véhicule automobile), l’assureur du propriétaire du bien paiera d’abord le propriétaire directement pour les dommages subis.

Dans l’exemple de Léonie qui est responsable de l’incendie de la maison de Jean, c’est donc l’assureur de Jean qui l’indemnisera directement selon les conditions de la police d’assurance, si le bien est couvert par une police d’assurance.

Une fois que l’assureur aura remboursé son assuré, il pourra toutefois intenter une poursuite civile contre Léonie et/ou ses parents afin de récupérer les sommes versées suite à la perte de la maison. Si le voisin de Léonie n’est pas assuré, il pourra lui-même effectuer cette poursuite.

Il en va de même pour l’enfant qui aurait perdu une dent dans une bataille à l’école et qui voudrait poursuivre la petite Frédérique afin de se faire rembourser les coûts de l’implant.

Le fardeau de preuve

La personne à qui un enfant cause des dommages devra prouver trois éléments obligatoires afin de pouvoir intenter un recours en responsabilité civile :

1) L’enfant a commis une faute[1];
2) Un dommage a été causé et
3) Le dommage a été causé par le fait ou la faute de l’enfant.

Il faut savoir que le titulaire de l’autorité parentale (le parent ou un tiers désigné comme tel par jugement), est tenu de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute du mineur (art. 1459 C.c.Q.). Il doit prouver n’avoir lui-même commis aucune faute dans la garde, la surveillance ou l’éducation du mineur pour se décharger de cette responsabilité.

Si le dommage est causé alors que l’enfant est sous la surveillance d’un tiers (éducatrice en garderie, enseignant, etc.), celui-ci pourra sera tenu de réparer le préjudice causé par le fait de l’enfant.

Les personnes ayant l’enfant sous leur responsabilité au moment des faits reprochés devront donc prouver n’avoir commis aucune faute dans la supervision de l’enfant, de même que sa surveillance, sans quoi un jugement pourra être rendu directement contre eux.

Jugement et enfant mineur

Si Léonie commet une faute en mettant le feu à l’immeuble et que ce feu cause un dommage à la maison de Jean, Léonie sera condamnée au paiement de la perte causée à Jean – soit la valeur dépréciée de la maison au moment de l’incendie[1].

Il n’est toutefois pas possible d’exécuter un jugement rendu contre un enfant mineur. Un tel jugement ne pourra être exécuté uniquement lorsque Léonie aura atteint l’âge de 18 ans.

Un jugement pourra être rendu directement contre les parents ou la personne qui en exerçaient la supervision au moment des faits reprochés, à moins que ces personnes ne prouvent n’avoir commis aucune faute dans la surveillance de l’enfant[2].

 
L’assurance responsabilité civile

Si Léonie est elle-même couverte par une police d’assurance responsabilité, généralement contractée au même moment que l’assurance-habitation des parents, l’assureur lui fournira un avocat pour se défendre des procédures intentées contre elle. Il en va de même pour les parents et/ou surveillants s’ils sont couverts par ce type de police.

Si la responsabilité de Léonie et de ses parents ou surveillants est couverte par la police d’assurance, l’assureur remboursera directement le demandeur – celui-ci n’aura donc pas à attendre que Léonie ait 18 ans pour exécuter un jugement si personne d’autre qu’elle n’a commis de faute.

La plupart des polices d’assurance responsabilité excluent toutefois les fautes intentionnelles et actes criminels de la couverture d’assurance. Les dommages causés par de telles fautes sont donc entièrement à vos risques. Dans le cas de Léonie, il faudrait vérifier si, compte tenu de son âge et des circonstances, elle aurait raisonnablement pu prévoir qu’un incendie se déclencherait en mettant le feu au bac.

Consultez votre courtier en assurance pour plus d’information.


[1] Si l’enfant n’est pas doué de raison, on parlera alors d’un « fait » plutôt que d’une faute, puisque le droit établi qu’on ne peut commettre une faute alors que l’on n’est pas doué de raison (art. 1457 C.c.Q.). Il n’existe pas d’âge pour être considéré « doué de raison » - il s’agira de déterminer essentiellement si l’enfant peut distinguer le bien du mal, ce qui se produit généralement vers l’âge de 7 ans.

[1] Par opposition au coût de la reconstruction, que l’assureur (ou la victime, si elle n’est pas assurée), devra assumer seul.
[2] Si la garde/surveillance est faite à titre gratuit (ex. : une grand-mère qui garde son petit-fils), on devra plutôt prouver que ce gardien a commis une faute – le fardeau de preuve ne sera plus sur le surveillant de démontrer qu’il n’en a commis aucune.

Publication initiale août 2017

Valérie Laberge
Avocate en droit de la famille

Valérie Laberge est avocate et exerce en droit de la famille depuis son admission au Barreau en 2009. Elle est titulaire d'une maîtrise en droit privé – ses travaux de recherche portent sur la garde partagée. Elle est membre du Comité du Barreau du Québec en droit de la famille et a publié de nombreux articles et commentaires de jurisprudence dans le domaine. Valérie est aussi maman de deux jeunes garçons. Pour plus d’information sur sa pratique, rendez-vous sur son site ou sur sa page Facebook.


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