Quel homme pourrait aller acheter des protections hygiéniques à sa femme comme s’il achetait une pinte de lait? Pourquoi sommes-nous aussi gênés devant les lois de la nature? Une question de culture? De croyance? De pudeur?
Le cycle menstruel dépendant des hormones1
Rappelons que du point de vue physiologique, les menstruations sont le résultat de la liquéfaction de la muqueuse qui tapisse l’intérieur de la paroi de l’utérus. Le jour où les règles commencent est compté comme le premier jour du cycle. Au début de chaque cycle, quelques ovules se mettent à se développer dans les ovaires, ainsi que les cellules qui les entourent. Ces dernières forment une sorte de coque nommée follicule de De Graaf. Les follicules commencent à secréter de l’œstrogène. Après quelques jours, la plupart des follicules cessent de se développer. Il n’en reste généralement qu’un, qui poursuit son développement pendant que l’ovule à l’intérieur poursuit sa maturation. Sous l’influence du taux croissant des œstrogènes dans le sang, la muqueuse se reconstruit. Le follicule prend beaucoup de place et bombe la surface de l’ovaire jusqu’à l’ovulation, qui correspond à la sortie de l’ovule hors du follicule éclaté. Le follicule se transforme en corps jaune et sécrète la progestérone en plus de l’œstrogène. Sous l’influence de la progestérone, la muqueuse utérine se transforme en accroissant ses vaisseaux sanguins et ses glandes pour se préparer à l’implantation de l’ovule en cas de fécondation. En l’absence de fécondation, le corps jaune régresse, ce qui provoque un arrêt de la sécrétion des hormones. La muqueuse utérine cesse sa croissance, dégénère jusqu’à sa liquéfaction. Ce seront les règles du cycle suivant.
L’impureté pour les religions
« Quand une femme aura un flux, un flux de sang dans sa chair, elle sera sept jours dans son impureté. Quiconque la touchera sera impur jusqu’au soir. Tout meuble sur lequel elle se couchera pendant son impureté sera impur, tout objet sur lequel elle s’assiéra sera impur. » Ancien Testament, Lévitique, chapitre 15 vers, 19 et 202.
Pendant des siècles, la société voyait le corps des femmes comme un corps mou, creux, qui peut perdre du sang de couleur variée. Le corps de la femme était considéré comme faible et imparfait. Le sang menstruel, lui, était vu comme néfaste, maléfique, impropre. Pline L’Ancien (23-79 av. J.-C.), un écrivain romain naturaliste, auteur d’une monumentale encyclopédie intitulée Histoire naturelle a affirmé qu’« une femme qui a ses règles fait aigrir le vin à son approche (…) son seul regard ternit l’éclat des miroirs, émousse le tranchant du fer (…) à son contact le lin qu’on a fait bouillir noircit, le cuivre prend une odeur fétide et se rouille »3. Comment ne pas se sentir sale devant de tels propos?
Pour les bouddhistes japonais, les femmes menstruelles n’ont pas le droit de s’occuper des temples. Chez les hindouistes, on interdit aux femmes de participer à la vie familiale lors de leurs menstruations. Elles doivent être « épurées » avant qu’on leur permette de retourner dans leur famille.
Heureusement, plusieurs cultures célèbrent les premières menstruations comme rite de passage. En Inde du Sud, les premières règles des jeunes filles sont célébrées et elles reçoivent des présents pour marquer cette occasion, de même chez les Apaches qui exécutent la danse du soleil levant et célèbrent pendant quatre jours le passage du statut de la jeune fille au statut de femme.
La médecine : une vision dépréciative et lente face au changement4
Selon Hippocrate (460-370 av. J.-C.), grand médecin et philosophe de l’Antiquité, le sang menstruel sert à nourrir le fœtus, ce qui explique l’absence de règles lors des grossesses. Selon Aristote (384-322 av. J.-C.), les femmes jouent un rôle mineur dans la conception, le sperme ferait tout et le sang menstruel couvrirait la semence masculine. Hippocrate et Aristote ont influencé les connaissances médicales pendant quinze siècles. Le corps des femmes est considéré comme imparfait, faible, et le sang, mystérieux et néfaste. Il faut attendre la Renaissance pour que les pensées évoluent. En Europe, on croit alors que la conception est l’union de la semence masculine, de la semence féminine et du sang menstruel.
Ce n’est qu’au XVIIe siècle, que Reynier de Graaf découvre l’existence des follicules ovariens, c’est-à-dire des sortes de coques de cellules dans l’ovaire, dans lesquelles se développe un ovule, qui a permis de comprendre le rôle du sang menstruel et de découvrir ce qu’est la semence féminine. Enfin en 1931, le Japonais Kyusaku Ogino découvre l’ovulation. Avec les travaux de Hermann Knauss, ils concluent que l’ovulation se passe entre le 12e et le 16e jour de la fin du cycle et diffusent la méthode du calendrier que nous connaissons, aussi appelée Méthode Ogino Knauss qui permet d’estimer approximativement la période d’ovulation des femmes. Peu de temps après, le Dr Zuck T.T. fait la corrélation entre les variations de température et l’ovulation. Il a fallu attendre 1955, pour que Rita Henry-Breault et Gilles Breault développent la méthode sympto-thermique au Canada. Cette méthode se base sur la température du corps au repos et les différents signes et symptômes de fertilité pour définir le cycle menstruel et permettre enfin aux femmes de comprendre complètement leur cycle et d’accéder à une contraception ou une conception naturelles.
De nos jours, une réelle évolution?5
Les publicités touchant les règles se concentrent sur un message de fraîcheur et de discrétion, n’affichant jamais la couleur du sang, remplacé par un fluide bleu, aucunement produit par notre corps. Les menstruations doivent être cachées, voire niées. Combien de fois a-t-on entendu lier nos changements d’humeur à nos menstruations? On a associé jusqu'à 150 symptômes ressentis par les femmes. La solution qui a donc été trouvée est d’éliminer les manifestations du cycle et de le régulariser par une médicalisation ou plutôt une surmédicalisation avec les contraceptifs hormonaux, l’hormonothérapie, la chirurgie, les antidépresseurs, les antidouleurs…
Réagissons!
Non! Mesdames, nous ne sommes pas folles! Seuls 5 à 10 % d’entre nous ressentent des malaises physiques et/ou psychologiques qui dérangent notre quotidien. Tous les symptômes tels acné, fatigue, désordre alimentaire, étourdissement… ne sont pas forcément reliés aux symptômes prémenstruels. D’autres causes comme le stress, la fatigue et l’alimentation peuvent les expliquer. Alors, développons une vision positive et globale du phénomène. Les transformations surviennent dans le corps des femmes tout au long de leur cycle menstruel et ces derniers changent avec l’âge. Apprendre à connaître notre cycle menstruel, reconnaître ses manifestations, et acquérir une meilleure estime de soi et de son corps, permettront de changer les mentalités. Arrêtons d’avoir honte de ce phénomène naturel que sont les menstruations. Cela nous démontre simplement que nous sommes capables de concevoir la vie! Seréna Québec s’est engagé dans la promotion de la connaissance du cycle féminin depuis sa création, enseignant aux couples et aux femmes la méthode sympto-thermique, une méthode naturelle, écologique, économique qui respecte l’intégralité du corps de la femme.
Références
- 1 Seréna Québec. 2010. Seréna : Le cycle féminin apprivoisé. En ligne. Consulté le 1er novembre 2010.
- 2 Avenirs de femmes. 2010. Avenirsdefemmes.com – Portail de la santé de la femme. En ligne. Consulté le 1er novembre 2010.
- 3 WorlLingo Translations. 2010. Worldlingo.com. En ligne. Consulté le 1er novembre 2010.
- 4 Pathol08. 2010. Réseau informations médicales. En ligne. Consulté le 1er novembre 2010.
- 5 Réseau québécois d’action pour la santé des femmes. S.d. Réseau québécois d’action pour la santé des femmes : Pour une approche globale et féministe de la santé. En ligne. Consulté le 1er novembre 2010.
Par Emmanuelle Maurin
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