Le nombre de signalements d'enfants en détresse a augmenté de 6 % cette année sur le territoire montréalais, une hausse de 20 % par rapport à 2004. Dans son bilan annuel publié hier, la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) de Montréal tisse des liens étroits entre la hausse des cas de négligence parentale et la toxicomanie. "Ça fait plus de trois ans qu'on fait le bilan et on remarque une amélioration assez constante des signalements", a expliqué hier le directeur de la protection de la jeunesse à Montréal, Jean-Marc Potvin.
Pour l'année 2005/2006, la DPJ a reçu 8 840 signalements, la plupart faits par des policiers et des employés de différents organismes de santé et de services sociaux. Après examen, 4 161 signalements ont été retenus. La DPJ montréalaise avait reçu 8 326 signalements en 2005 (4 161 retenus) et 7 349 en 2004 (4 058 retenus). Les signalements retenus ont ainsi grimpé de 7 % depuis deux ans. Si les signalements d'agressions physiques et sexuelles, de troubles de comportement et d'abandons augmentent très peu, ceux concernant la négligence ont fait un bond de 12 % cette année. Des enfants abandonnés dans leur berceau à ceux qui ne reçoivent pas les soins appropriés, cette négligence parentale prend plusieurs visages. "C'est un problème plus méconnu, mais les conséquences sont au moins aussi graves que celles des agressions sexuelles ou de la violence. La différence, c'est que cette négligence est moins spectaculaire et passe donc plus inaperçue", a souligné M. Potvin.
Les parents négligents sont à l'origine de 54 % (2 172) des signalements retenus. Des enfants âgés de moins de 11 ans écopent dans près de 80 % des cas. La DPJ montréalaise s'inquiète de la corrélation entre la négligence et les mauvais traitements infligés aux enfants par rapport à la consommation abusive d'alcool et de drogue de leurs parents. Les études démontrent que le taux d'abus et de négligence est de 10 à 16 fois plus élevé chez les parents toxicomanes. Dans 60 % des cas de négligence recensés cette année à Montréal, les parents étaient toxicomanes. "La détresse des familles et les problèmes de toxicomanie augmentent à Montréal, notamment avec l'isolement et le nombre de mères monoparentales", a indiqué M. Potvin. Certains parents n'hésitent pas à se prostituer, vendre de la drogue ou tremper dans d'autres activités illicites pour consommer. Pendant ce temps, leurs enfants sont souvent laissés à eux-mêmes. Les problèmes de toxicomanie touchent davantage les mères seules qui vivent dans la pauvreté. Entre 28 et 44 % d'entre elles ont été victimes d'inceste et plusieurs possèdent des antécédents de négligence et de violence.
Au Québec, les signalements d'enfants en détresse traversent aussi une période une croissance, même plus forte qu'à Montréal. Les voleurs d'enfance, réalisé par Paul Arcand, aurait-il eu un impact sur cette augmentation globale? "C'est difficile à évaluer, mais le côté positif d'un tel documentaire est d'attirer l'attention", a conclu M. Potvin.
Source : La Presse, 27 septembre 2006