Si la grossesse et l’accouchement sont pour des raisons évidentes réservés aux femmes, qu’en est-il de l’allaitement? Pour des raisons tout aussi évidentes, on répond spontanément que c’est l’apanage des femmes. Pourtant, les pères ne doivent pas se sentir exclus, car ils peuvent s’impliquer de telle façon que ce geste maintes fois répété durant des mois devienne aussi le leur! Il a même été remarqué que les allaitements réussis avaient en commun un papa très présent.
« Je crois que si mon conjoint ne m’avait pas soutenu dans la décision d’allaiter, je n’aurais pas réussi puisque dans les moments de découragement, il est intervenu en me donnant des solutions et en m’encourageant à continuer. » Vicky, 35 ans, et Gilles, 45 ans, sont les parents des jumeaux Antoine et William qui ont maintenant 7ans (allaités 17 mois) et d’Olivier 5 ans (allaité 20 mois). C'est Vicky qui a d'abord sensibilisé Gilles aux bienfaits de l'allaitement, mais ce sont les cours prénataux qui l’ont convaincu de s’impliquer pour que l’allaitement soit une expérience réussie. « Avec des jumeaux, je n’avais pas le choix de m’impliquer, car on n’a jamais assez de bras! Puisque j’étais déjà convaincu, je voulais m’impliquer pour que cela fonctionne et donner ce qu’il y a de mieux aux bébés. »
Sans s’être vraiment informés au préalable, Alain, 30 ans, et Hélène, 32 ans, étaient tous les deux convaincus que l'allaitement était la voie naturelle de l’alimentation du nourrisson. « C’est sur ce principe que nous avons pris la plupart de nos décisions pour tout ce qui entoure la naissance de notre enfant, tant durant la grossesse que pour l’allaitement. C’est principalement pour cette raison que nous voulions qu’Hélène allaite notre enfant. Il y avait aussi la curiosité de tenter l’expérience… » Comme tous les pères, Alain s’est vite rendu compte que l’allaitement pouvait signifier l’exclusion, à la différence qu’il a décidé de trouver une manière de s’inclure dans l’expérience. « Il est vrai qu’à sa naissance, le nouveau-né a un horaire d’activités très restreint : manger et dormir en passant par le changement de couche. Comme nous avions décidé de donner le lait maternel, il est clair que je ne pouvais pas allaiter l’enfant. J’ai donc décidé de m’impliquer pour deux raisons principales : créer un contact tôt avec mon enfant, et soutenir ma conjointe dans cette expérience. »
Mais comment un père peut-il se mêler d'allaitement? « Je me levais la nuit pour aller chercher le bébé et l’amener à ma conjointe. Après un sein, je changeais la couche du bébé. Après le deuxième sein, je recouchais le bébé. Ceci allégeait la tâche de ma conjointe qui pouvait se reposer un peu plus et cela me permettait d’être très près de mon bébé et de ma conjointe. Les journées au travail étaient plus difficiles, mais cela en valait la peine… », affirme Alain. Une manière de s’impliquer qui rejoint celle de Gilles auprès de sa conjointe. « J’aidais à placer les bébés au sein, à faire les rots, à prendre soin de la maman. Je donnais aussi les bains, ce qui est devenu un moment privilégié entre moi et mes enfants. Maintenant, ils sont plus grands et puisque je m’implique depuis le début, je suis toujours très présent auprès de mes enfants (jouer, bricoler, histoire...) »
Les deux papas sont d'accord sur une autre chose : leur implication quotidienne, tant auprès de la maman que des bébés leur a permis de valoriser leur rôle de père, de se sentir importants et inclus dans cette belle aventure, comme l’explique Alain. « Cela a été une expérience enrichissante par les liens que j’ai pu créer avec mon enfant et ma conjointe. Il arrivait qu’Hélène soit découragée ou exténuée. Je pouvais alors la soutenir moralement, mais aussi garder le bébé à la maison pendant qu’elle allait prendre une heure ou deux ailleurs pour se changer les idées; sortir de la maison de temps en temps lui faisait du bien. »
Comme l'allaitement demande un engagement de tous les instants, surtout tant que l’enfant est nourri uniquement au sein, les mamans ont avantage à laisser de la place aux papas qui souvent n’attendent qu’une ouverture! « La présence et le soutien de mon conjoint ont été un élément majeur du succès de mes allaitements (2 enfants allaités jusqu’à 15 mois et 18 mois), particulièrement le premier, raconte Hélène. N’ayant pas été exposée ou en fait très peu à l’allaitement maternel et ayant grandi dans une société (et une famille) encore très axée sur le biberon, sans l’aide de mon conjoint et son soutien moral, j’aurais probablement démissionné plus tôt. Ce n’est pas que l’allaitement est difficile en soit, mais il arrive des événements (poussées de croissance, muguet, mastites, pression sociale des proches...) qui demandent plus d’énergie, qui suscitent plus d’inquiétude et qui nous mènent facilement vers le choix du biberon (qui, croit-on, sera bien plus simple) quand nous ne sommes pas bien soutenues et encouragées par nos proches. Et de nos proches, notre conjoint est le plus important parce qu’il partage notre vie 24/24, 7/7. »
Un avis partagé par Vicky qui a vraiment apprécié l'aide de Gilles. « Il répondait aussi aux personnes qui avaient des commentaires négatifs face à l’allaitement. Étant donné qu’il s’est impliqué dès le début, nous avons trouvé chacun notre rôle face à l’éducation des enfants et nous continuons dans ce sens. »
Comment s’impliquer
- Apportez le bébé à la mère tant le jour que le soir et la nuit.
- Changez sa couche avant l'allaitement ou entre les deux seins puisque bébé s’endort souvent en tétant.
- Après l'allaitement, faites faire le rot à bébé et endormez-le si c’est l’heure de la sieste.
- Donnez le bain : c’est une merveilleuse occasion d’interagir avec bébé et qui peut devenir une habitude à long terme durant toute la petite enfance des enfants.
- Favorisez la relaxation de la mère en lui massant le cou et les épaules
- Profitez des périodes d’allaitement pour faire la cuisine, ranger un peu, passer le balai ou amuser les autres enfants de la famille pour que maman puisse se concentrer sur sa tâche sans stresser à l’idée de tout ce qui l'attend après.
Plus le papa s’implique auprès de la mère et de l’enfant allaité et plus l’allaitement devient une expérience épanouissante pour tous les membres de la famille. Il est facile de conclure que les mamans qui ne sont pas soutenues s’épuisent rapidement et risquent d’abandonner plus rapidement que celles qui peuvent compter sur leur conjoint. L'allaitement peut donc être une occasion extraordinaire de rapprochement entre les parents qui développent une complicité de tous les instants sur un fond d'affection et de respect mutuel. Vive les papas qui se mêlent d'allaitement!
Le réseau Nourri-Source, un mouvement provincial et bénévole d'entraide et de soutien à l'allaitement maternel a lancé « Les pères et l'allaitement », un documentaire qui révèle avec simplicité que plusieurs pères savent naturellement soutenir et s'impliquer, mais surtout se passionner pour leur nourrisson. Et ils vous le diront tous : l'allaitement a enrichi leur rôle de père! Le documentaire est disponible sur le site de la Fédération Québécoise Nourri-Source au coût de 28 $.