Près de 80 % des femmes enceintes connaissent des nausées et des vomissements dans le premier trimestre de leur grossesse. Pour 1 % des futures mamans, ces malaises intenses peuvent même les conduire à l'urgence où elles seront hospitalisées.
« On parle alors d'hyperémèse, de nausées et de vomissements excessifs. La future maman a cessé de s'alimenter durant plusieurs jours et accuse une perte de poids », explique la chercheuse Anick Bérard, du CHU Sainte-Justine. Les femmes enceintes qui souffrent d'hyperémèse peuvent ainsi perdre jusqu'à 5 % de leur poids initial. Cela nécessite généralement quelques jours d'hospitalisation et un traitement à base d'antiémétiques tout au long de la grossesse.
Le métoclopramide s'avèrerait bien meilleur que les antivomitifs pour diminuer plus rapidement la sévérité des vomissements. Cette molécule a été récemment introduite au CHU Sainte-Justine suite à l'alerte de Santé Canada sur le dropéridol susceptible d'accroître les risques cardiovasculaires.
Les résultats de cette récente étude auprès de 229 femmes souffrant d'hyperémèse, pilotée par la titulaire de la Chaire pharmaceutique famille Louis-Boivin - Médicaments, Grossesse et Allaitement, ont été publiés dans le European Journal of Obstetrics and Gynecology and Reproductive Biology.
Pas à la légère
Car il y a nausées et... nausées extrêmes. Si elles constituent une manifestation « normale » liée au débalancement hormonal du début de la grossesse, elles ne doivent pas empêcher la future maman de s'alimenter.
Lorsqu'un simple verre d'eau suffit à faire vomir et que l'alimentation représente une épreuve insurmontable, il ne faut pas hésiter à consulter. « Les femmes consultent de plus en plus tôt, c'est encourageant. Si l'hyperémèse s'installe, cela peut être plus long et difficile », rappelle la chercheuse qui évalue le seuil critique à seulement deux jours sans alimentation.
Les étourdissements, la déshydratation et les crises de vomissements à répétition constituent les symptômes avant-coureurs. Si on ne décède plus d'hyperémèse, comme il y a 100 ans, ne plus s'alimenter peut nuire au bébé en plein développement.
Certains gestes peuvent aider — prendre de petites portions, consommer du gingembre, réduire les fritures ou le café — et peuvent apporter un certain bénéfice. Mais lorsque la femme enceinte souffre de nausées et de vomissements intenses, la médication s'avère incontournable.
Contrairement à l'idée reçue, la prise de médicaments n'est pas rare chez les femmes enceintes. Plus de 50 % seraient sous médication, principalement sous antidépresseurs.
Au cours de la grossesse, la femme enceinte doit avoir une bonne prise de poids — 35 livres en moyenne — pour que l'embryon se développe bien. On sait maintenant qu'un enfant en santé demande une maman en santé.
« Les premiers mois qui suivent la naissance nécessitent d'une énergie monstre. Il n'y a pas de recette miracle, la future maman doit bien s'alimenter », tranche la chercheuse. Et pour cela, d'abord arrêter de vomir...
Note : Les indications de prise de poids ont été récemment modifiées. Elles se basent sur le poids de départ de la future mère et varient entre 15 livres (femme obèse) et 45 livres (femme maigre).
Attention aux antidépresseurs
La prise d'antidépresseurs devrait toujours être réfléchie. « Il faut étudier la situation à la pièce. Nous avons des données probantes que les antidépresseurs augmentent les risques de fausse-couche, de malformation et de bébés au petit poids », tranche la chercheuse. Environ 14 % des femmes en prendraient durant leur grossesse.
Ainsi le Paxil, l'un des plus utilisés n'est pas du tout recommandé chez les femmes enceintes. Pas question toutefois d'arrêter toute médication lorsqu'on attend un bébé, mais il faut établir le ratio risque/bénéfice lié à la prise de ces puissants médicaments.