Les femmes québécoises font effectivement plus de bébé qu'avant et semblent en voie de freiner la chute démographique qui était constatée depuis la fin des années 1990. La fécondité québécoise se situe en effet au-dessus de 1,6 enfant par femme pour la première fois depuis une décennie!
Les données publiées par l'Institut de la statistique du Québec font état, en 2006, d'un indice synthétique de fécondité de 1,62 enfant par femme au Québec, comparativement à 1,51 en 2005 et à 1,48 en 2004. Il s'agissait d'une quatrième année consécutive d'augmentation, mais celle-ci s'est démarquée par son importance.
Selon Evelyne Lapierre-Adamcyk, professeure de démographie à l'Université de Montréal, il est encore beaucoup trop tôt pour y voir un renversement de tendance, mais les données sont encourageantes parce qu'elles semblent mettre un frein à la chute démographique observée ces dernières années.
Elle souligne que les données par tranche d'âge sont particulièrement révélatrices : selon l'Institut de la statistique, entre 2005 et 2006, l'augmentation du taux de fécondité a été de 3 % chez les femmes de 20-24 ans, de 6 % chez les 25-29 ans, de 10 % chez les 30-34 ans et de 13 % chez les 35-39 ans.
Elle en déduit que les faibles taux de fécondité observés depuis une décennie chez les femmes de 20 à 29 ans et qui ont décidé d'avoir des enfants alors qu'elles ont maintenant entre 30 et 39 ans semblent démontrer une décision de reporter leur grossesse. Son collègue Bertrand Desjardins, également professeur de démographie à l'Université de Montréal, s'interroge toutefois sur la possibilité d'un effet de conjoncture — que plusieurs femmes aient attendu l'entrée en vigueur du nouveau régime de congés parentaux, en janvier 2005, qui était promis et attendu depuis longtemps, et qui aurait pu fausser la donne. Malgré tout, il estime que les données sont positives puisqu'elles pointent en direction d'un redressement de la fécondité, bien qu'il note, tout comme Mme Lapierre-Adamcyk, qu'il est trop tôt pour y voir un renversement de tendance.
De son côté, celle-ci hésite à associer la hausse au régime de congés parentaux, faisant valoir qu'il ne s'agit que d'une bonification d'un programme déjà existant, celui de l'assurance-emploi. Selon elle, le programme de services de garde a une influence beaucoup plus grande de par son accessibilité et du fait que les parents québécois le prennent désormais pour acquis. À l'instar de son collègue, toutefois, elle reconnaît que les politiques familiales instaurées depuis une dizaine d'années par l'État québécois sont venues soutenir une volonté d'avoir des enfants qui, elle, ne se dément pas. Mme Lapierre-Adamcyk souligne que le taux de fécondité des femmes québécoises se maintenait, depuis les années 1950, à environ 1,6 enfant, mais qu'il tendait, depuis le début des années 2000, à chuter vers les 1,5 ou 1,4 enfants par femme.
Parmi les autres données publiées par l'ISQ, on apprend que, l'an dernier, 82 100 naissances ont été enregistrées au Québec, soit 8 % de plus qu'en 2005. La hausse du nombre de naissances et de la fécondité s'étend à toutes les régions du Québec, à l'exception de la région du Nord-du-Québec, qui affiche la fécondité la plus élevée, à 2,67 enfants par femme. Quatre régions ont enregistré une fécondité d'environ 1,8 enfants par femme en 2006 : l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, Chaudière-Appalaches et les Laurentides. Bien qu'également en progression, le nombre moyen d'enfants par femme a été un peu plus faible à Québec, à 1,44, et à Montréal, à 1,50.