Sachant que dans les pays industrialisés, 26,3% des accouchements se terminent en césarienne, selon l'Institut national de santé publique, on pourrait s’imaginer que les femmes sont suffisamment bien préparées psychologiquement à une telle éventualité. Pourtant, plusieurs mères décrivent cette expérience comme traumatique et en garde un très mauvais souvenir.
Entre la 20e et la 25e semaine de grossesse, les parents sont conviés aux cours prénataux. Lors de ces rencontres, les grands termes relatifs à la maternité sont abordés : le travail, l’accouchement par voie basse, l’arrivée du bébé et l’allaitement. Cependant, l’importance accordée à la césarienne et ses suites n’est peut-être pas suffisante pour prémunir les femmes contre le choc qu’elle peut représenter. Hélène Vadeboncoeur, chercheuse en périnatalité et auteure de l’ouvrage Une autre césarienne ou un AVAC? S’informer pour mieux décider, précise : « La césarienne est un sujet qui a généralement été évité, et par les médecins et dans les cours prénataux. D’ailleurs, ce n’est que depuis 2013 qu’on retrouve de l’information sur le sujet dans le Mieux vivre avec son enfant, remis aux femmes enceintes par le gouvernement ».
Douleurs
Si dans les cours prénataux l’aspect chirurgical de la césarienne est abordé, ses effets physiques et psychologiques sont, quant à eux, un peu négligés. Martine, mère du petit Lou raconte : « Cette douleur… Je ne m’attendais pas à avoir si mal et à être si dépendante des autres. J’aurais tellement aimé qu’on me dise que j’allais souffrir mais que ce ne serait pas éternel. ».
Si certaines femmes semblent plutôt bien tolérer la chirurgie, d’autres souffrent atrocement. Plusieurs facteurs peuvent influer sur la manière dont le corps tolère la césarienne. La fatigue, la préparation mentale, la manière dont l’incision a été effectuée, ainsi que le seuil de douleur propre à chaque individu, sont des éléments qui entre en ligne de compte.
Sentiment d'impuissance
« Je me sentais tellement incapable. Je n’arrivais même pas à laver mon bébé. Quel genre de mère étais-je? », dit Justine, maman de la petite Iris. Puisque les premières semaines post-césarienne sont souvent synonymes de douleurs et d’inconforts, les mamans ont parfois du mal à accomplir différentes tâches. Elles entrent alors dans le jeu des comparatifs et se sentent rapidement incompétentes.
Pourtant, il faut au minimum trois semaines pour se remettre tranquillement d’une césarienne. Bien qu’il soit important de bouger pour activer la circulation et ainsi prévenir les phlébites (caillots aux jambes), il n’y a rien de honteux à faire les choses à son rythme. « La récupération pour une césarienne est comparable à celle d’une chirurgie, dit Mme Vadeboncoeur. Pendant quelques semaines, elle handicape jusqu’à un certain point et elle nuit au contact avec le bébé. ».
Culpabilité et colère
Stéphanie, maman d’une petite fille aujourd’hui âgée de 5 ans, se souvient : « Même si c’était une césarienne planifiée, je me suis longtemps sentie coupable de ne pas avoir été capable de donner la vie d’une manière naturelle. »
Hélène Vadeboncoeur nous explique que la césarienne peut également avoir un impact sur l’estime de soi. « Plusieurs femmes, peuvent vivre de la déception, de la tristesse et même un état de choc pouvant mener à un traumatisme et même, à un stress post-traumatique », souligne-t-elle.
Les femmes qui apprennent ou considèrent que leur césarienne n’était pas nécessaire ressentent souvent de la colère et dans ces cas, selon Mme Vadeboncoeur, « les réactions sur le plan psychologique, ressemblent souvent à celles éprouvées lors du deuil ». Pour cette raison, lors de situations où la césarienne est nécessaire et indispensable, il faut rapidement souligner aux femmes qu’avoir une césarienne ne signifie pas nécessairement que la prochaine naissance se soldera de la même manière.
Changer les pratiques
S’il est parfois impossible d’éviter la césarienne, Mme Vadeboncoeur soutient que pour aider les femmes à mieux supporter cette épreuve, il est nécessaire de changer les pratiques. Selon elle, « il faut permettre aux mères d’avoir leur bébé en peau à peau dès sa naissance, dans la salle d’opération, dans la chambre de réveil et dans la chambre, puisque l’une des plus grandes peines des femmes est de ne pas avoir vu leur bébé dès sa naissance ou de ne pas l’avoir tenu contre elles à ce moment-là. »