Dans le cadre de la Semaine canadienne de Sensibilisation à l’Infertilité, le Centre de la Reproduction McGill a tenu le 20 mai dernier une séance d’information publique qui faisait état des progrès récents dans le traitement de l’infertilité. Cette séance a en réalité pris la forme d’une soirée de promotion pour le dernier-né du panier de traitements de McGill, la maturation in vitro d’ovocytes immatures (IVM). Cette technique, qui évite à la femme les souffrances associées à la stimulation des ovaires pour la production d’un grand nombre d’ovules matures, apparaît tellement douce aux yeux des experts, et des deux vedettes venues témoigner de leur expérience, qu’elle a été surnommée « In Vivo Maturation ». Est-ce un truc pour mieux la vendre aux femmes infertiles et à l’État qui s’apprête à financer les traitements de l’infertilité, qui après la fertilité et la maternité, est perçue comme une maladie?
Et les autres approches?
Le contexte de la soirée se situait clairement en aval de l’infertilité dans la ligne d’une médicalisation plus poussée. On n’a pas mentionné de solutions alternatives comme l’adoption ni cherché de solutions en amont. Il n’y avait pas dans la salle un Dr Richard Béliveau de l’infertilité pour parler de prévention. Il n’y avait rien non plus sur les méthodes de sensibilisation à la fertilité (Fertility Awareness Methods) développées depuis 50 ans en contraception douce. Afin d’inviter toute confusion avec un esprit de marketing, il aurait fallu bien entendu traduire « awareness » par « prise de conscience ». La prise de conscience amène généralement une prise en charge, qui se traduit pour l’État en économies.
Seréna
Ceux qui, comme les gens de Seréna, enseignent aux couples à mieux connaître leur fertilité sont sensibles à la souffrance des femmes qui ont de la difficulté à concevoir. Ils ont en fait développé une grande compassion pour celles qui sont confirmées hypo-fertiles. Ils voient que la douceur des Méthodes d’Auto-Observation du cycle féminin n’enlève pas aux couples leur exaspération devant leur difficulté à démarrer une grossesse et qu’une peur de ne pas être fertiles s’installe peu à peu devant la croissance de l’infertilité causée par une pollution qui affecte le processus de la reproduction humaine. Ils constatent de plus en analysant de milliers de cycles non médicalisés que la vitesse de la vie moderne ne colle plus toujours à celle des cycles naturels. Tout cela et les délais, que les couples se donnent pour entreprendre une première grossesse, les incitent à ne pas les juger infertiles trop vite.
La nature cache parfois son jeu comme dans le cas d’une vedette de cette soirée qui a eu une fertilisation in vitro, au prix fort, et une fertilisation in vivo, gratuite et sans douleur. Grâce à une reprise de conscience de leur cycle féminin, dont ils avaient confié la garde à la médecine, des couples de tous les âges ont obtenu un taux élevé de succès. Certaines fertilisations in vivo, qui suivaient plusieurs cycles d’essais infructueux, ont alors été perçues comme des miracles. L’expérience de Seréna en auto-observation du cycle féminin lui a appris que l’infertilité était souvent associée à des essais mal ciblés pendant un certain nombre de cycles avec ovulation et non pas à des essais à l’aveugle pendant un certain nombre de mois comme le spécifient certaines cliniques. Ils ont aussi appris que la période où la fertilisation naturelle (« in vivo ») est possible dans un cycle se compte parfois en heures et non pas en jours.
La connaissance du cycle
Devant la montée du désir de maternité de plusieurs femmes, il devient urgent de jeter plus de lumière sur la fertilité du cycle féminin tel qu’observé par les femmes. L’auto-observation n’intervient pas dans le processus de procréation et enseigne aux femmes à voir la lumière à l’entrée de leur utérus, là où des signes de fertilité leur sont accessibles, comme la glaire cervicale et les changements au col, et leur parlent au jour le jour de leur fertilité et leur annoncent l’imminence d’un plateau de quelques jours de fertilité élevée. Je l’ai récemment appelé « plateau de fertilisation » parce que c’est pendant ces jours que les spermatozoïdes deviennent fringants et que l’ovule est éjecté. Par une prise de température d’une dizaine de jours, elles ont l’évidence d’une ovulation et la confirmation d’un cycle potentiellement fertile, peu importe sa longueur.
Une approche préventive
Bien que Seréna soit convaincu que la médecine de pointe peut aider plusieurs femmes, il privilégie des actions et de la recherche en amont. Étant donnée la baisse générale de la fertilité tant chez l’homme que chez la femme, il propose une auto-observation du cycle féminin assistée par des conseillers et des outils numériques. Cette approche préventive sur le terrain est plus rentable socialement que des interventions miraculeuses en laboratoire. La prise de conscience de l’infertilité féminine est un domaine scientifique encore peu exploré. L’auto-observation du cycle féminin par des femmes habiles et intelligentes est aussi une science dont les conséquences sociales et économiques sont significatives. L’État devrait supporter davantage les actions douces faites en amont. En aval les solutions ne sont pas toujours le meilleur choix. Les organismes qui travaillent déjà dans la prise de conscience en fertilité devraient être invités à travailler dans la prise de conscience en infertilité. La définition de l’infertilité fonctionnelle devrait être confiée à une institution publique neutre et non pas laissée aux cliniques privées.
Un problème commun aux deux sexes
La souffrance morale des couples peu fertiles, hypo-fertiles ou infertiles est bien réelle, mais il ne faudrait pas qu’elle soit encore une fois portée par la femme seule, comme c’est le cas pour la maternité, la contraception et l’avortement. Pourquoi les femmes devraient-elles payer de leur souffrance leur désir d’être mères? La fertilité des hommes est aussi en baisse. Elle semble même plus affectée que celle des femmes par notre mode de vie et par la détérioration de l’environnement. Une vedette de la soirée nous a révélé que son conjoint avait lui aussi vécu des ratées dans sa fertilité. Les hommes qui portent une partie de l’infertilité du couple participeront-ils par leur mode vie à la préparation d’une conception? Suivront-ils un jour les femmes dans leur marche pour des maternités désirées, sans douleur et sans dépendance médicale? Dans son panier de soins, l’État devrait favoriser les couples qui prennent leur fertilité en charge tôt dans leur vie fertile afin de ne pas se retrouver dépourvus quand leur horloge arrivera au bout de sa course.
Jean Laflamme, moniteur et collaborateur de Seréna
Seréna Québec
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