Tu étais caché là, bien au chaud, en attendant l’automne alors que les bourgeons sortaient petit à petit, pour dévoiler les premières feuilles du printemps. J’avais l’impression que les jours étaient interminables parce que c’était la première fois depuis toujours que je devais faire le décompte des semaines avant de découvrir la plus belle surprise de ma vie. Le mois de mai est enfin arrivé, j’ai encerclé dans le calendrier la date de ma première fête des Mères en rose… Ma première fête des Mères, j’avais un frisson! C’était comme clair, Mademoiselle, vous serez une maman!
La veille de la fête des Mères, je ne me souviens plus qui, mais quelqu’un m’a dit : « L’année prochaine, ce sera ta première fête des Mères, as-tu hâte? ». J’étais comme un peu fru.
J’ai dit : « Euhh, mais c’est ma première fête des Mères demain, je suis déjà une maman, non? ». J’ai eu droit à un : « Vous autres, les jeunes, vous n’avez pas de patience, vous n’êtes pas capables d’attendre et c’est pour ça que vous n’appréciez rien! »… J’étais comme beaucoup fru! Je suis restée bouche bée avec un sentiment de Tu-ne-vaux-même-pas-la-peine-que-je-te-réponde-CHOSE.
Depuis maintenant 3 mois, je me levais aussi fatiguée que lorsque je m’étais couchée. Je faisais tout en fonction de devenir une mère parce qu’être enceinte, c’est mécanique, c’est chimique, c’est physique. Je m’inquiétais à savoir si tu allais bien, à savoir si tu te développais bien. Je lisais tout pour savoir ce que tu devenais dans mon ventre tous les jours. Je passais parfois des soirées en mode parano parce que j’avais mangé quelque chose qu’il ne fallait pas dans les trente-douze affaires que je ne savais pas qu’il fallait éviter (?!?). Je dépensais pour de la bouffe clairement pour absolument rien parce que ma toilette mangeait pas mal plus que moi tout ce que je cuisinais. J’avais déjà des discussions avec L’Amoureux à savoir si tu irais au collège privé où à l’école publique. Je regardais pour mon assurance-vie au cas où il m’arriverait quelque chose. Des vergetures apparaissaient à des places que je ne savais même pas que je pouvais vergeturer. Je ne buvais plus de vin dans les 5 à 7, je me couchais tôt, je fuyais les endroits de fumeurs comme la peste et mes discussions tournaient toutes autour de toi. Je me berçais déjà dans le vide et je devais expliquer à des inconnus pourquoi j’avais décidé d’être une maman à mon âge alors que c’était loin d’être de leurs affaires.
Ce mois de mai 2008, c’était ma première fête des Mères, pas parce comme « Chose » le disait, j’étais trop pressée de fêter la fête des Mères, simplement parce que déjà, j’aurais donné ma vie pour toi. Cette première fête des Mères était très significative. Je la passais avec ma maman, qui elle vivait la première fête des Mères sans un de ses bébés : ma petite sœur était décédée quelques semaines auparavant. Je savais que j’étais une maman parce que j’avais juste à m’imaginer être à sa place et j’avais le cœur qui voulait fendre littéralement en deux. Un enfant, dès que tu sais qu’il est en toi, tu sais déjà que tu es une maman, tu sais qu’il te suivra toute ta vie peu importe ce que la vie en décidera. C’est vital, l’amour maternel, c’est palpable parce que tu as la ferme conviction de toucher au bonheur, de croquer dedans comme on croque dans le meilleur gâteau au chocolat du monde.
Bref, pour moi ce n’était pas discutable, même si tu ne courais pas encore partout dans la maison et que je ne devais pas encore te préparer des purées, même si « Chose » avait tenté de péter ma bulle, je continuais à me bercer dans le vide en attendant ma première fête des Mères. J’étais déjà ta maman et je le serai pour toujours mon bébé…
P.S. Maman, je t’aime xxx