Il faut comprendre que pour certaines mères dont le bébé prend exclusivement le sein, leur niveau de production de lait est une préoccupation constante pour elles, car le développement de leur nourrisson en dépend entièrement! Que se passerait-il, si après une session de sport, leur production de lait chutait? Pour rassurer ces troupes et vanter (encore une fois!) les bienfaits de l’exercice physique postnatal, on s’entretient avec Karène Valladeau-Chevriot, consultante en lactation certifiée IBCLC pour faire le point sur l’entraînement conjugué à l’allaitement.
Est-ce que l’activité physique est compatible avec l’allaitement?
KVC : S’entraîner est sain pour toutes les périodes de la vie d’une femme, y compris, bien sûr, pendant la grossesse et l’allaitement. Quand on allaite, c’est non seulement possible de faire du sport, mais c’est recommandé!
Dois-je moduler l’intensité de mon entraînement pendant la période d’allaitement?
Contrairement à la croyance populaire, l’intensité de votre entraînement postnatal est plutôt une question de votre remise en forme post-accouchement que de lactation! La relaxine est une hormone sécrétée durant la grossesse ET pendant toute la période de l’allaitement (en moindre quantité que lorsqu’on est enceinte, mais néanmoins présente) et doit être prise en compte lors du choix des exercices, car elle assouplit les articulations et ligaments qui nous stabilisent. Il est alors primordial de choisir un entraînement adapté pendant la période d’allaitement pour éviter des blessures.
KVC : Ce que l’on sait c’est que les mères allaitantes qui s’entraînent témoignent qu’elles se sentent énergiques. Les changements hormonaux, mais aussi posturaux et musculaires qui apparaissent pendant la grossesse et l’accouchement peuvent causer, entre autres, des troubles musculo-squelettiques, un affaiblissement du plancher pelvien et des abdominaux. Cependant, il n’y a aucune preuve suggérant que l’allaitement joue un rôle dans la persistance ou l’aggravation de ses difficultés. Tant qu’une femme est confortable, l’allaitement n’est pas une raison pour stopper l’entraînement. Maintenir une bonne hydratation est particulièrement recommandé. Il faut penser à bien s’hydrater AVANT et PENDANT l’exercice.
Comment l’entraînement peut-il affecter ma lactation? Au niveau du goût, ma production de lait, les toxines?
KVC : Les études récentes nous enseignent, qu’après un entraînement modéré à intense, il n’y a aucun impact négatif sur la qualité du lait, ni sur la quantité de lait produit. Dans le cas d’une mère qui s’entraîne avec une intensité extrême (100 %), les taux d’acide lactique vont augmenter à court terme. Cela est sans danger pour le bébé. Il se peut seulement que certains bébés refusent de téter le temps que les taux d’acide lactique diminuent dans le sang (compter environ 90 minutes pour un retour à la normale). Idem concernant le goût salé de maman qui a transpiré. Certains bébés peuvent y être sensibles, auquel cas, il suffira à la mère de rincer ses seins avant la tétée.
Concernant les toxines, il est déconseillé quand on allaite (mais pas seulement) de suivre un programme de perte de poids ultra rapide ou un régime drastique. Pourquoi? Car les contaminants environnementaux liposolubles (liés aux graisses) et les toxines stockées dans le gras du corps passent dans le lait quand les apports en énergie sont sévèrement restreints. Cela ne concerne pas une mère qui a une diète équilibrée et qui s’entraîne régulièrement à une intensité modérée à intense.
Quels sont les conseils pour une mère allaitante qui veut reprendre l’activité physique?
KVC : S’assurer d’avoir un bon support des seins grâce à un soutien-gorge de sport. Certaines compagnies offrent des brassières de sport et d’allaitement, 2-en-1.
Le maintien des seins est très important. Cependant, on veut éviter de mettre trop de pressions sur les seins pour éviter le blocage des canaux lactifères.
Allaitez avant votre séance d’entraînement afin d’éviter l’inconfort de l’engorgement durant l’exercice.
Favorisez les activités où l’on peut s’entraîner avec bébé et ainsi respecter ses besoins et rythmes de tétées.
KVC : En résumé, l’entraînement durant l’allaitement est tout à fait compatible et devrait être encouragé, car cela participe à garder la femme en santé et a un effet positif sur son bien-être émotionnel - améliore l’énergie, réduit les niveaux de stress, constitue un facteur protecteur contre la dépression.
Karène Valladeau-Chevriot est une consultante en lactation certifiée IBCLC (International Board Certified Lactation Consultant), mère de 3 enfants et sportive.
Sources
- “Breastfeeding and Human Lactation” 4th Ed. Jan Riordan and Karen Wambach
- “Core Curriculum for Lactation Consultant Practice” 2nd Ed. ILCA
- http://kellymom.com/bf/can-i-breastfeed/lifestyle/mom-exercise/
- http://www.lllfrance.org/vous-informer/fonds-documentaire/allaiter-aujourd-hui-extraits/1173-62-allaitement-et-sport
- https://www.breastfeeding.asn.au/bfinfo/exercise-and-breastfeeding