Bébé

Est-il mauvais de laisser un bébé pleurer?

Il existe des méthodes d’apprentissage du sommeil, comme la méthode Ferber, qui impliquent de laisser un bébé pleurer jusqu’à ce qu’il dorme. Selon de nombreux spécialistes, ces méthodes devraient être abandonnées.

Mettons d’abord ce sujet chaud en contexte en vous rappelant que de nombreux parents sont en déficit de sommeil. On peut en rire ou en pleurer, mais le fait demeure que ces parents exaspérés cherchent des solutions pour dormir des nuits complètes. Parmi ces solutions se retrouvent les méthodes d’apprentissage du sommeil comme la méthode Ferber, aussi appelée la méthode du 5-10-15. Si cette méthode est jugée efficace par certains spécialistes du sommeil, elle est jugée néfaste par beaucoup d’autres spécialistes de la petite enfance, dont ceux qui ont participé à la rédaction de la brochure intitulée La nuit aussi, les enfants ont besoin de nous - Pourquoi les méthodes « d’apprentissage du sommeil » sont à déconseiller. Voici ce qu’ils en pensent et pourquoi ils vous suggèrent d’autres solutions.

L’objectif n’est pas de lui apprendre à ne plus pleurer, mais à communiquer autrement

La plupart des spécialistes consultés pour créer cette brochure parlent des effets négatifs de ces techniques sur les habiletés de communication de l’enfant. Par exemple, le Dr Klaus E. Grossmann, chercheur scientifique dans le domaine de l’attachement explique que les parents qui répondent aux besoins de l’enfant en étant réceptifs à ses pleurs l’encourageront à diversifier ses méthodes d’expression. Devant l’ouverture de ses parents, le bébé apprendra à faire des gestes, des sons et des mimiques.

Si au contraire les parents laissent les bébés pleurer seuls dans une chambre obscure, ceux-ci auront peur d’être abandonnés et n’apprendront pas à remplacer les pleurs par une méthode plus agréable de communication. Selon lui, ils arrêteront éventuellement de pleurer avec ces méthodes, mais ce ne sera que par épuisement et résignation. Il ajoute : « L’enjeu du développement de l’enfant n’est pas l’extinction des pleurs, mais bien une meilleure communication avec nos enfants en bas âge, qui prend progressivement la place des pleurs. »

Le pédiatre californien William Sears abonde dans le même sens quand il dit que la seule chose que les parents apprennent à leur enfant avec la méthode du 5-10-15, c’est que ses pleurs n’ont pas de valeur communicative.

En plus, le sentiment de sécurité que les parents tentent par tous les moyens de transmettre à leur enfant pendant la journée est contraire à cette absence totale de sécurité à laquelle ils les soumettent pendant la nuit. À cause de cette dissonance, les efforts de le rassurer pendant le jour ont moins d’impact.

Le besoin de proximité des enfants

On sait donc que les bébés ont besoin du réconfort de leurs parents jour et nuit, sans distinction. C’est une des raisons principales qui poussent ces spécialistes à croire que la méthode Ferber est néfaste. Les bébés ne reçoivent pas cette proximité et cette protection dont ils ont besoin quand on les laisse pleurer jusqu’à ce qu’ils s’endorment. 

Selon ces spécialistes, il faut lui fournir cette proximité pour favoriser son attachement et éviter de le déstabiliser pour qu’il acquière la stabilité intérieure qui lui permettra de gérer sa vie d’adulte.

Il n’y a pas d’âge pour faire ses nuits

Selon le docteur berlinois Michael Abou-Dakn, « Le souhait que l’enfant dorme longtemps et s’endorme facilement est devenu le sujet brûlant de notre époque. Jadis, c’était la propreté précoce que l’on exigeait des enfants. Aujourd’hui, c’est la faculté de s’endormir et de dormir sans problème. » Il est vrai qu’en plus de vouloir dormir au plus vite, les parents se font régulièrement demander si leur enfant fait enfin ses nuits.

Pourtant, il n’y a pas vraiment de « bon âge » pour dormir plusieurs heures d’affilée. Selon le docteur Jürgen Zulley, « vous ne pouvez pas forcer un bébé ou un bambin à faire ses nuits tant qu’il n’est pas mûr pour cette étape. Tôt ou tard, tout enfant fera ses nuits, mais chacun possède son propre rythme. »

Que faire alors?

Selon les spécialistes, il n’y a pas de solution miracle sinon de faire preuve de beaucoup d’amour et de patience, et de fournir au bébé tout ce dont il a besoin. Plus précisément, Theresia Herbst  suggère une prise en charge aimante, la douceur par la parole, le contact physique, l’allaitement à la demande, le sommeil partagé et l’encouragement des besoins de protection, d’exploration et d’autonomie. Selon elle, l’attachement qui en résultera renforcera sa confiance, son estime de soi, sa capacité à interagir avec les autres, son aptitude à découvrir le monde et à aborder l’entourage en toute confiance.

Et si vous choisissez de l’utiliser tout de même?

Certains parents pourront quand même choisir d’utiliser la méthode Ferber, mais devront s’armer d’espoir et de patience parce que cette méthode n’est pas immédiatement compatible avec la nature de leur enfant. Celui-ci cherche naturellement le soutien de ses parents quand il a peur et devra se battre contre ses instincts pour vous faire plaisir si vous choisissez de l’y entraîner pour mieux dormir. Comme le dit le pédiatre Carlos Gonzales, « Les enfants n’ont pas beaucoup d’exigences. Pour les choses qui ne comptent pas vraiment pour eux, ils se plient volontiers à nos humeurs et font ce que nous attendons d’eux. Mais si nous leur demandons de dormir seuls, nous exigeons une chose contraire à leurs instincts les plus essentiels, et la lutte est dure. »

Image de Anne Costisella

Anne Costisella est diplômée en communication publique à l’Université Laval et maman de deux enfants. En plus d'être une rédactrice web d'expérience,  Anne est aussi l'auteure du blogue Techno Maman


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