Une triste journée

C'est la première fois que je me lance dans un témoignage de vie...
Faut croire que je suis marquée à vie par ce qui vient de se passer...

Hier était une journée bien ordinaire. Un lundi, la fin du week-end, le retour au travail. J'appelle au bureau pour les aviser de mon retard car, une fois de plus, ma moto est en panne. Et c'est à ce moment que l'on me lance la nouvelle: "Le bureau sera fermé aujourd'hui, ma jeune collègue de travail est décédée dans la nuit!" Pardon? Mais comment? Que s'est-il passé?

Il ne se passe pas une semaine où je n'entends pas que telle ou telle personne est décédée. Les décès font partie du quotidien ici. Mais là, c'est ma collègue, celle qui m'a accueillie et qui m'a mise à l'aise lorsque je suis arrivée dans cette équipe de travail. Elle est partie, brusquement, sans un seul au revoir. Putain que la vie est dure ici. Que la vie a été dure avec elle. En près d'une seule année, elle a perdu ses deux parents ainsi que l'enfant qu'elle portait après 8 mois de grossesse. Et voilà maintenant que c'est son tour.

Avec mes collègues féminines, nous allons nous asseoir dans la cour familiale tôt le matin pour supporter la famille. Vers midi, nous nous rendons à la morgue, accompagnées des vieilles tantes qui doivent laver le corps et des oncles qui doivent déposer le corps dans le cercueil. Je suis là comme support seulement (à la limite, j'ai même besoin d'un support pour me supporter) car je ne peux absolument rien faire, surtout après avoir vu ma collègue étendue sur une table en ciment, recouverte d'un pagne, entourée de d'autres corps inertes dans des sacs en plastique noirs avec les chaussures sur le dessus.

J'ai besoin d'air, le soleil de 40° me plombe trop sur la tête, je vais m'évanouir... Une collègue m'accompagne pour aller chercher de l'eau au goudron. Nous n'étions pas encore sortie de la cour de la morgue que nous entendons des coups de feu. C'est la panique totale, nous courrons nous mettre à l'abri dans la morgue (tellement rassurant comme cachette), nous attendons que cela cesse. On nous informe que les médecins de l'hôpital seraient en grève depuis quelques jours. Je ne le savais pas. Pour calmer les grévistes, des coups de feu ont été tirés. Il semble qu'il y ait des blessés. Je ne veux pas le savoir. Il n'y a qu'un mur qui nous sépare de l'hôpital. Je veux rentrer chez moi retrouver mon fiston.

3 heures après notre arrivée à la morgue, le corps est prêt. Les oncles embarquent le cercueil dans le pick-up et nous revenons vers la cour familiale en faisant un cortège avec les motos, traversant la ville au complet, brûlant tous les feux rouges, les gens se levant à notre passage par respect pour la défunte. C'est un moment très triste mais en même temps c'est un moment rempli d'émotions. C'est un hommage pour ma collègue décédée mais c'est aussi un hommage à la vie. Je la pleure mais je ne peux m'empêcher de remercier la vie d'être là à conduire ma moto, en santé et de savoir que mon fils m'attend à la maison.

C'était une journée dans ma vie, une triste journée. 

chere copinette des bébés métisses...c'était pas une journée rose pour toi. Mes sympathies pour ta collègue et en effet, apprécies ce soir ton ptit bonhomme. Fait lui un gros bisou pour moi, je t'embrasse et je suis contente qu'il ne te soit rien arrivée 

Pauvre chouette! Déjà que c'est un évènement dure à vivre en plus la situation qui dégénère à l'hopital!! Je trouve que c'est un très beau témoignage que tu as fais à ta collègue! Toutes mes sympathies à toi aussi et profites du soleil qui brillent ainsi que de ton p'tit amour!!