Récit d'un accouchement à la maison

Jeudi le 18 octobre 2007...

J'écoute la télé, comme à tous les soirs: question de me mettre au "neutre" bien comme il faut. Comme à tous les soirs depuis des mois, j'ai des contractions non douloureuses. Pourtant, cette fois-ci, je sens que c'est différent. En plus de mon ventre qui devient dure, je ressens une pression vers le bas.

À 22h30, je décide d'aller me coucher... je sens que je ne dormirai pas toute la nuit et je veux avoir récupéré un peu avant l'arrivée de mon deuxième bébé! Je sens... non, je SAIS que c'est pour bientôt.

Vendredi 19 octobre 2007 2h55 du matin...

Les contractions sont plus douloureuses, la pression se fait plus forte. Je me lève, pleine d'espoir, très fébrile à l'idée que bientôt, je tiendrai mon bébé dans mes bras.

Je réveille mon amoureux en lui disant de se tenir prêt. Avant d'aller prendre mon bain, je lui demande de vérifier mon col: je suis déjà dilatée à 5 cm. Il demeure couché, mais je sais qu'il n'arrive plus à dormir: il est anxieux et fébrile lui aussi, il se demande comment tout va se passer.

3h00: je me fais couler un bain. La chaleur de l'eau me fait du bien. Pour garder un certain "détachement", je lis dans le bain. Je suis calme, je suis heureuse.

3h15: Les contractions semblent s'intensifier... quoi que je n'en suis pas certaine: serait-ce mon excitation qui fait que je m'imagine des choses? Je calcule la durée des contractions: elles durent environs 1 minute et demi à 2 minutes chacune. Elles ne sont pas régulières. Une vague aux 4 à 8 minutes seulement.

3h20: Je suis maintenant certaine que je ne m'imagine rien. Je suis fébrile. Je sors du bain et mets des vêtements propres.

3h30: J'appelle D. Je lui explique ce qui se passe. Elle me dit de l'attendre, qu'elle arrive bientôt. C'est elle qui va appeler I.

3h35: J'appelle ensuite ma cousine. Je la réveille (c'est certain). Je suis calme au téléphone et je sais que bébé n'arrivera pas tout de suite. Je lui dit de prendre son temps, de se décoller les yeux et de ne pas rouler trop vite: mes membranes ne sont pas rompues, alors le bébé n'arrivera pas tout de suite.

Entre 3h35 et 3h50: Je me rends à ma chambre pour aller chercher les articles à mettre au four (couvertures, compresses, débarbouillettes, ...) et je fais bouillir de l'eau. Je commence à être un peu anxieuse, je me demande comment ça va se passer. J'aide mon amoureux à préparer le lit, mettre le plastique sur le matelas, ...

Quand une contraction commence, je prends de bonnes respirations, je sens qu'elle me transporte et j'essaie de "rentrer" dedans, d'être avec elle. Je parle à mon bébé. Je lui dit qu'on franchira cette étape ensemble et que tout ira bien. Bientôt, nos regards se croiseront et nous ferons connaissance!

3h50: Ma cousine arrive. Je m'installe ave elle dans la salle à manger. Je suis soulagée de la voir. Soulagée de savoir qu'elle sera là si Colin se réveille.

3h55: Je me servais un verre d'eau à la cuisine quand une contraction m'a littéralement "sciée en deux"! Je sens que je résiste un peu contre la douleur et qu'il est temps que je prenne un temps pour me recentrer.

4h00: Je me couche sur mon lit, sur mon côté gauche... c'est ainsi que je resterai jusqu'à la naissance de mon enfant.

4h05: Colin se lève. Il est tellement content de voir Audrey. Il passe en courant devant ma chambre, vient m'embrasser et repart aussitôt vers Audrey. Tous deux descendent au sous-sol. Je sais qu'il est en confiance et que s'il a envie de venir nous voir, il le pourra!

4h20: Enfin, D. arrive! Je suis souriante, sereine et heureuse de la voir. Elle me sourit. Elle écoute le coeur du bébé. Tout va bien. Sa présence douce et discrète m'apaise, malgré la tempête qui se déchaîne dans mon corps.

Je demande à mon amoureux d'apporter des compresses chaudes. Je commence à m'impatienter: il ne va pas assez vite à mon goût et je dois "tout" lui expliquer. Lorsque les compresses sont prêtes et qu'il me les mets dans le dos et dans le bas ventre, leur chaleur me fait du bien et m'aide à me laisser aller.

Entre 4h50 et 5h15: Les hommes devraient avoir au moins 3 paires de bras pour "soutenir" une femme qui accouche! Mon pauvre amoureux ne fournit pas avec les compresses... d'autant plus que je lui demande de me tenir la main! La pression est vraiment forte, et pendant les contractions, j’ai un peu mal au cœur. J’ai l’impression que je n’y arriverai jamais, que je n’aurai plus de force pour accoucher!

5h16 : ENFIN!!! Les membranes rompent… ou plutôt « explosent »! Le liquide amniotique coule et la pression diminue beaucoup. D. essuie un peu mon périnée et me redonne des forces : on voit les cheveux du bébé.

5h16 à 5h21 : De toutes mes forces et de tout mon être, je pousse lors des contractions. Lorsque la tête, les épaules et une partie du tronc sont sortis, mon petit ange pousse son premier cris : il semble en furie!

5h22 : Enfin, mon bébé, mon ange, mon petit amour, tu es là! Tu es magnifique. D. et I. t’assèchent. En contact peau à peau, tes pleurs cessent et tu nous regardes avec de grands yeux étonnés. On dirait que tu vois nos âmes. Je regarde finalement entre tes jambes pour constater, à ma grande surprise, que tu es un garçon!
Colin monte avec Audrey et ils font ta connaissance. Ton grand frère ne s’éternise pas en notre compagnie : après t’avoir donné un bisou, il repart en-bas pour regarder son film!

5h35 : Tu prends le sein pour la première fois. Je suis impressionnée par ta technique de succion : tu es vraiment un « téteux parfait »!! Tu me regardes toujours avec ce regard interrogateur et intelligent. Comme quand tu étais dans mon ventre, nous faisons un à nouveau.

5h46 : La délivrance. Le placenta, cet organe nourricier, cette deuxième mère, quitte mon corps. Malgré la réticence de Martin, je veux l’enterrer dans la cour et planter un arbre pour symboliser la naissance de notre enfant.

Vers 6h00, D et I quittent la chambre et nous laissent Martin, notre enfant et moi. Nous regardons longuement le fruit de notre amour en se demandant comment on pourrait bien l’appeler. Nous avons choisi Gabriel Paul Jutras. Paul en la mémoire de mon oncle Paul Wirtz décédé le 3 avril 2006 à 5h22… et Gabriel : l’Ange des anges, simplement parce que ce prénom doux s’est imposé tout doucement étant donné les circonstances.

Puis, D. et I. sont revenues. Je suis allée prendre une douche et D. m’a fait mes points… déchirure au 2ème degré oblige! Je me suis ensuite étendue confortablement dans mon lit propre. J’ai mis Gabriel en peau à peau et D. et I m’ont apporté à déjeuner.

À 7h30, plus aucun indice qu’un événement extraordinaire s’était produit au petites heures du matin… sauf bien sûr la présence de notre deuxième fils et une certaine odeur de naissance.

Je n’ai pas réussi à dormir de la journée, mais qu’importe, j’étais chez moi et ma famille comptait un homme de plus! Je ne veux plus jamais donner naissance ailleurs que chez moi… à moins de complications.

FÉlicitation ton récit est magnifique

C`est un très beau récit...Ça me rappelle des souvenirs du 6 avril 2007 lorsque mon deuxième est venu au monde chez moi dans la chaleur de ma maison...Je n`oublierai jamais cette journée...JAMAIS!

Je souhaite que dans un avenir rapproché plus de femmes décident d`avoir un accouchement à la maison, c`est tellement plus doux et simple...

Ton récit est si beau et si simple mais comment grandiose.

Félicitation !

wow!Quel beau récit!Félicitation et merci d'avoir partagé ton expérience avec nous.