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Conte d'origine chinoise, pour Hélo (et les autres)

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 24 mai 2008 12:56:21 EDT  
Conte d'origine chinoise : La Tortue et les deux hérons

Sur les bords d'un lac tranquille, trois amis vivaient en paix. Deux hérons cendrés nommés Tching et Tchang, et une dame tortue d'un âge avancé, Pi-Houan.

Or un été, ils connurent une sécheresse terrible. Une période de famine s'annonçait. Un soir, les trois amis tinrent conseil :

"Nous devons partir vers le nord, déclara Tching, il faut nous envoler loin d'ici dès demain !

- Allons voir des cieux nouveaux", dit Tchang

Mais une voix coupante l'interrompit brutalement :

"Et moi ! s'exclamait Pi-Houan, indignée. Comment vais-je partir ?"

Les deux hérons se regardèrent, contrits. C'est vrai, se dirent-ils, nous ne pouvons laisser ici notre vieille amie, qui serait vouée à une mort certaine. Mais comment l'emmener ?

"Il faut trouver une solution", dit Tching.

Ils tinrent conciliabule.

- Chère vieille amie, je suis d'accord avec vous, mais comment vous transporter ? Il s'agit d'un long voyage ! soupira Tching.

- Et vous êtes lourde, dame Pi-Houan, plaisanta Tchang. Je me souviens, l'été dernier, quand vous vous êtes posée sur mon pied ! Aïe...

- J'ai peut-être une solution, dit Tching, nous pourrions couper un solide bâton, nous le tiendrions, Tchang et moi, chacun par un bout, Pi-Houan le mordrait en son milieu...

- Bravo, fit Tchang. C'est une idée remarquable, et dame Pi-Houan ne nous rompra pas la tête avec son bavardage !"

"Dame Pi-Houan, insista Tching, surtout n'ouvrez pas la bouche, nous volerons à haute altitude, et malgré votre carapace, si vous tombiez, vous vous briseriez les reins !"

La tortue acquiesça d'un hochement de tête.

Une heure plus tard, les trois amis s'envolaient. Au milieu de l'après-midi, des paysans qui travaillaient dans les champs aperçurent leur étrange équipage : "Voyez cette tortue, comme elle est intelligente ! s'exclamèrent-ils. Elle se fait transporter par deux hérons !"

Pi-Houan se garda bien de répondre, mais, tout en mordant le bâton avec énergie, elle savourait les compliments.

Les deux hérons poursuivaient leur vol régulier, mais la fatigue commençait d'engourdir leurs ailes. Ils avaient hâte de trouver une rivière, un lac paisible, près duquel se poser.

Comme ils passaient au-dessus d'une prairie, des petits bergers les montrèrent du doigt. Dame Pi-Houan, qui ne se lassait pas des compliments, tendit l'oreille :

"Regardez ces deux hérons, disait un jeune garçon, ils emmènent cette balourde de tortue, sans doute pour agrémenter leur repas du soir, comme ils sont intelligents !

- Stupides bergers, vous n'y comprenez rien !" voulut s'écrier Pi-Houan. Mais à peine avait-elle ouvert la bouche qu'elle lâchait le bâton, et s'écrasait sur le sol, la carapace éclatée.

Le sage, dit le maître du Zen, accueille d'un coeur égal la flatterie ou le mépris. Nul ne peut nous agresser moralement sans notre consentement, c'est nous qui ouvrons les écluses au chagrin. Aucune injure ne pouvait faire lâcher prise à la tortue. L'insulte, le mépris, l'anathème représentent l'opinion de celui qui les profère, c'est son problème, pas le nôtre. Il se peut au demeurant que le blâme soit justifié, nous l'acceptons comme tel. Qui est parfait ? Il se peut aussi qu'il soit erroné, partial, injuste, nous le laissons dans la bouche de celui qui l'a prononcé. Notre paix, notre destin sont entre nos mains.

"Entre nos dents", bougonne le fantôme de la tortue.

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 12 août 2008 21:36:59 EDT  
Restons zen.

Smile

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 2 août 2008 19:53:27 EDT  
(Je prends la liberté de remonter un peu ce message, en espérant que vous ne m'en tiendrez pas rigueur).
Cool

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 24 mai 2008 15:34:07 EDT  
Contente que vous aimiez !
Le conte "La tortue et les deux hérons" a été reprise par Jean De La Fontaine, mais il l'a modifiée et personnellement, je préfère la vesion originale...
Question

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lilalexe

Inscrit le :
16 janv. 2008

Posté le: 24 mai 2008 14:31:16 EDT  
C,est vraiment beau...surtout l'histoire du Samourai

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 24 mai 2008 13:56:28 EDT  
Ce sont mes favorites, mais je peux te conseiller le livre-audio suivant :

"Les plus beaux contes zen", 1 et 2.

Personnellement, je les emprunte à la bibliothèque, mais tu peux aussi les acheter.
Il y a aussi des albums pour enfants, splendidement illustrés :

Petits contes zen / Jon J. Muth

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Hélo

Inscrit le :
10 avr. 2008

Posté le: 24 mai 2008 13:35:41 EDT  
Merci,
J'aime particulièrement l'histoire du samurai mais les deux autres sont très biens aussi!
Hélo
P.S.; ne te gêne pas si tu en a d'autres!

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 24 mai 2008 13:12:21 EDT  
Une dernière :

HISTOIRE DE MIAOU

Un samouraï, guerrier farouche, pêchait le long d'une rivière.

Il attrapa un poisson et s'apprêta à le faire cuire, lorsqu'un chat, tapi sous un buisson bondit et lui vola sa prise. Furieux, le samouraï sortit son sabre, rejoignit le chat et le coupa en deux. Ce guerrier était un bouddhiste fervent et le remords d'avoir tué un être vivant l'obséda.

En rentrant chez lui, le bruit du vent dans les arbres chantait miaou. Le bruit de ses pas sur le sol résonnait miaou. Les gens qu'il croisait sur son chemin semblaient lui faire miaou. Le regard de ses enfants reflétait des miaou. Ses amis également miaulaient sans cesse à son approche. En tous lieux, en toutes circonstances, c'étaient des miaou lancinants.

La nuit, il ne rêvait que de miaou. Le jour, chaque son, chaque pensée, chaque acte de sa vie se transformaient en miaou. Lui-même était miaou.

Son état ne faisait qu'empirer. Son obsession le poursuivait, le torturait, sans trêve et sans relâche. Ne pouvant venir à bout de tous ces miaou, il se rendit dans un temple pour y demander conseil à un vieux maître Zen.

" S'il vous plaît, s'il vous plaît, délivrez-moi... aidez-moi... ", supplia-t-il.

Le Maître Zen lui répondit :

" Vous êtes un guerrier, comment avez-vous pu tomber si bas ? Si vous ne pouvez vaincre par vous-même tous ces miaou, vous ne méritez que la mort. Vous n'avez pas d'autre solution que de vous faire harakiri. Ici et maintenant. "

Et il ajouta :

" Cependant je suis moine, et j'ai pitié de vous. Dès que vous aurez commencé à vous ouvrir le ventre, je vous trancherai la tête avec mon sabre pour abréger vos souffrances. "

Le samouraï acquiesça, et, malgré sa peur de la mort, se prépara pour la cérémonie. Lorsque tout fut en place, il s'assit sur ses genoux, prit son poignard à deux mains, et l'orienta vers son ventre. Derrière lui, debout, le Maître brandissait son sabre...

" C'est le moment, lui dit-il. Commencez ! "

Lentement, le samouraï posa la pointe du couteau sur son abdomen. Et à cet instant, le Maître reprit la parole :

" Vos miaou, les entendez-vous toujours?

* Oh la la, pas maintenant! Vraiment pas maintenant.

* Alors, s'il n'y a plus de miaou, pas nécessaire de mourir. "

Nous sommes en réalité tous semblables à ce samouraï. Anxieux et tourmentés, peureux et craintifs à tout propos, la moindre chose nous effraie. Les problèmes qui nous accablent n'ont pas l'importance que nous leur accordons. Ils sont pareils aux miaou de l'histoire.

Face à la mort, qu'est-ce qui est vraiment important ?

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Euphroisine

Inscrit le :
26 févr. 2008

Posté le: 24 mai 2008 13:09:54 EDT  
Le miroir magique

Iriku avait beaucoup aimé son père. Aujourd'hui, le vieillard avait rejoint les ancêtres. Souvent, quand il tressait un panier de bambou, Iriku songeait :

- Si mon épouse n'avait eu tant d'aversion pour mon honorable père, il aurait été plus heureux dans ses vieux jours. Je n'aurais pas hésiter à lui manifester mon affection, mon respect filial. Nous aurions eu de longues et douces conversations. Il m'aurait entretenu des gens et des choses du passé... Et une mélancolie le prenait.

Un jour de marché, Iriku le vannier écoula son lot de paniers plus rapidement qu'à l'ordinaire. Il se promenait un peu désoeuvré parmi les éventaires, quand il remarqua un marchand chinois, qui offrait souvent des choses étranges :

- Approche, Iriku. dit le marchand, j'ai là quelque chose d'extraordinaire. Et avec un air de mystère, il retira d'un coffre, un objet rond et plat recouvert d'une étoffe de soie. Il le plaça entre les mains d'Iriku et avec précaution, il fit glisser l'étoffe. Iriku se pencha sur une surface polie et brillante. Il reconnut dedans l'image de son père, tel qu'il avait été au temps de sa jeunesse. Bouleversé, il s'écria :

- Cet objet est magique !

- Oui dit le marchand, on appelle cela un miroir, et sa valeur est grande !

Mais la fièvre avait saisi Iriku :

-Je t'offre tout ce que je possède, dit-il. Je veux ce "miroir magique" et emporter chez moi l'image de mon père bien-aimé.

Après un long palabre, Iriku abandonna au marchand toute sa recette de la matinée.

Dès qu'il fut rentré chez lui, Iriku alla dans son grenier et cacha l'image de son père dans un coffre. Les jours suivants, il s'éclipsait, montait au grenier, retirait le "miroir magique" du coffre ; Il demeurait de longs instants à contempler l'image vénérée et il était heureux.

Sa femme ne tarda pas à remarquer son étrange conduite. Un après-midi, alors qu'il abandonnait un panier à moitié tressé, elle le suivit. Elle le vit monter au grenier, fouiller dans un coffre, en extraire un objet inconnu, le regarder longuement en affichant un air mystérieux de plaisir. Il recouvrit ensuite l'objet d'une étoffe et le rangea avec des gestes amoureux.

Intriguée, elle attendit son départ, ouvrit à son tout le coffre, découvrit l'objet, fit glisser l'étoffe de soie, regarda et vit : Une femme ! Furieuse, elle descendit et apostropha son mari :

- Ainsi tu me trompes en allant contempler une femme dix fois par jour dans le grenier !

Mais non ! Fit Iriku, je n'ai pas voulu t'en parler parce que tu n'appréciais guère mon père, mais c'est son image que je vais voir et cela apaise mon coeur.

- Misérable menteur ! Vociféra la femme. J'ai vu ce que j'ai vu ! C'est une femme que tu as cachée au grenier !

- Je t'assure...

La dispute s'envenimait, devenait infernale, lorsqu'une nonne mendiante se présenta à la porte. Le couple réclama son arbitrage. La nonne monta au grenier, revint :

- C'est une nonne ! Dit-elle.

***

La plupart des problèmes viennent du fait que les gens ne vivent pas dans LE monde, mais dans LEUR monde...
Question

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