Gouvernement

Justice et Jeunesse

De façon à savoir ce qui se passe concrètement chez nous quant à l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant, nous avons interviewé un juge régulièrement confronté à des problématiques affectant enfants et adolescents, le juge François Beaudoin de la Cour du Québec.

N'est-il pas surprenant de savoir que de reconnaître les droits aux enfants est un thème relativement nouveau dans nos sociétés? Il y a à peine cent ans, les droits des enfants n'étaient pas considérés et ne se résumaient qu'à peu de chose. Malgré toutes les bonnes volontés, conventions et lois, des millions d’enfants à travers le monde vivent des situations compromettant leur sécurité ou leur développement. Ici, au Québec, la loi sur la protection de la jeunesse affirme que les parents sont les premiers responsables de leurs enfants. Malheureusement, il arrive que l’État doive intervenir lorsque la sécurité ou lorsque le développement d’un enfant est en danger, dans le but de mettre fin à la situation et d’éviter qu’elle ne se reproduise.

Le 20 novembre 2004, la communauté internationale célébrait le 15e anniversaire de la Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée générale des Nations Unies le 20 novembre 1989. De façon à savoir ce qui se passe concrètement chez nous quant à l'application de cette convention, nous avons interviewé un juge régulièrement confronté à des problématiques affectant enfants et adolescents, le juge François Beaudoin de la Cour du Québec.



MPLV.com : Juge Beaudoin, pourriez-vous en premier lieu vous présenter et nous faire part de votre champ d'intervention?


En quelques mots, je précise que je suis juge depuis 1979. Jusqu'en 1995, j'ai exclusivement siégé en chambre criminelle et pénale, spécialisée à juger les crimes et délits reprochés à des adultes. Bien sûr, dans le cadre de ces procès, j'ai été à même d'être en contact avec les enfants et les adolescents qui y apparaissaient à titre de témoin ou de victime. À cet égard, des dispositions spéciales sont adoptées pour tenir compte de leurs caractéristiques spécifiques, de façon à atténuer les inconvénients inhérents au processus judiciaire : huis clos, télé-témoignage, non-publication de leur identité, décorum simplifié, etc.

Puis, en 1995, à la suite d'un concours de circonstances, j'ai décidé de siéger également en chambre de la jeunesse, car ma région, celle de Labelle-Lanaudière-Laurentides-Laval, était dotée d'un nombre insuffisant de juges oeuvrant dans le domaine des jeunes, ce qui faisait que les délais d'audience étaient rendus déraisonnables et le nombre de dossiers entendus excessif. Je suis donc retourné sur les "bancs d'école" pour me familiariser avec les particularités du droit relié à la situation des enfants et adolescents. Dans les faits, j'ai suivi des cours dispensés par d'autres juges spécialisés dans ce domaine et j'ai effectué des stages qu'ils supervisaient. Mais sans négliger leur contribution, c'est sur le tas que j'ai le plus appris, en première ligne, alors que je devais décider de la conduite à adopter en relation avec, non pas un cas théorique, mais avec un être humain qui plus est s'avère être un enfant. Chaque situation étant différente, il faut rendre des décisions vraiment adaptées au cas soumis, et cela dépasse le simple apprentissage académique. Il faut savoir écouter tous ceux qui ont quelque chose à dire et tenir compte des opinions souvent contradictoires apportées par les témoins, par les experts et par les avocats de chacune des parties concernées par le dossier.

C'est un monde rempli de tensions et d'émotions où le juge doit tout tenter pour désamorcer le conflit en tentant de raccommoder ce qui est déchiré. C'est une tâche gigantesque où le cœur s'allie à la raison pour trouver la meilleure solution dans l'intérêt de l'enfant, puisque la plupart du temps la solution idéale ne peut pas être envisagée vu les nombreux facteurs sur lesquels le juge n'a pas de contrôle : non-collaboration d'un parent, fragilité mentale d'une partie au dossier, manque de ressources spécialisées, etc.

Mais là je laisse libre cours à mes états d'âme, car je m'étends peut-être un peu trop sur cette première question. Pour conclure cette première réponse, je précise que plus de 10 ans après ma décision, je siège encore en chambre de la jeunesse, même si de fait je suis membre de la chambre criminelle, parce que c'est ici que je me valorise davantage en contribuant à construire la vie d'un jeune. Mon travail à la chambre criminelle est lui aussi important, mais il est plus technique et surtout orienté vers le passé, c'est-à-dire le geste criminel posé par l'adulte.

MPLV.com : Pourriez-vous nous donner un aperçu de la nature des dossiers qui vous sont soumis en chambre de la jeunesse?


Voilà, il y a deux grandes catégories, les dossiers communément appelés "dossiers en protection" et les autres dits "en délinquance". Les premiers, les dossiers en protection, concernent la situation d'enfants exposés à voir leur sécurité et leur développement compromis pour différents motifs énoncés dans la loi : négligence des parents quant à leur soin, à leur entretien ou à leur éducation, isolement social, rejet affectif, exposition à un danger moral ou physique, abus sexuels, mauvais traitements, troubles de comportement de l'enfant, etc. En pareils cas, le rôle du juge est de décider si la situation de l'enfant se trouve compromise par une preuve prépondérante. Alors, le juge doit rechercher la solution pour faire cesser la situation de compromission. Il peut ainsi retirer la garde de l'enfant aux parents et le confier en famille d'accueil ou en centre de réhabilitation, il peut aussi laisser l'enfant à ses parents en leur ordonnant d'évoluer dans un cadre donné, avec un suivi spécialisé. Même si ce sont des cas plutôt exceptionnels, les ordonnances rendues au bénéfice de l'enfant peuvent s'appliquer jusqu'à l'âge de majorité de l'enfant, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'il ait 18 ans. C'est dans ce domaine que la loi a confié au Directeur de la protection de la jeunesse la responsabilité de saisir le tribunal des situations de compromission.
La deuxième catégorie, celle "en délinquance", vise l'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Le juge considère alors les infractions ayant été commises par un jeune âgé d'au moins 12 ans, mais de moins de 18 ans. Tout comme pour les adultes, le jeune accusé est présumé innocent jusqu'à preuve de sa culpabilité hors de tout doute raisonnable suite à un procès public, juste et équitable. Cependant, certaines garanties procédurales sont édictées pour tenir compte du statut d'adolescent de l'accusé. Au terme du procès, si le jeune est reconnu coupable, le juge doit rendre une peine selon les modalités particulières prévues dans la loi. La peine peut aller du simple suivi par un agent de probation jusqu'à la mise sous garde dans un centre désigné par la loi réservé aux jeunes.


MPLV.com : Si j'ai bien saisi vos propos, un jeune de 10 ans ne serait donc pas poursuivi pour le vol qu'il aurait commis?
Vous avez bien compris, mais cela ne signifie pas qu'aucune intervention ne serait faite. Dans un tel cas, il est probable que le service policier chargé de l'enquête en informerait les parents, pour qu'ils assument leurs responsabilités face à l'éducation de leur enfant. Dans l'éventualité où pareille mesure serait insuffisante ou encore s'il y avait récidive, le service de police pourrait faire un signalement au Directeur de la protection de la jeunesse, lequel prendrait la situation en main au motif de troubles de comportement graves de l'enfant. Ce dernier pourrait même saisir le juge de cette problématique qui deviendrait alors un dossier de la première catégorie mentionnée, celle "en protection".

Il faut avoir également à l'esprit que les dispositions du Code civil québécois font en sorte de rendre responsables sur le plan monétaire les parents de l'enfant pour réparer le tort qu'il a pu causer à des tiers.

MPLV.com : Quand le Directeur de la protection de la jeunesse intervient-il?


Lorsqu'un signalement lui est fait que la situation d'un jeune de moins de 18 ans est compromise au sens qu'il est exposé pour l'un des motifs que j'ai mentionnés plus haut, le Directeur assigne l'un de ses délégués au dossier pour enquête et décision. Il peut alors si la situation est reconnue mettre en place, avec le concours des parents, des mesures volontaires visant à faire disparaître ou à corriger la situation problématique. À défaut, il peut en saisir le tribunal, lequel tiendra une audience pour décider de la situation. Si le juge ordonne des mesures visant à corriger la situation, ce sont les auxiliaires du Directeur de la protection de la jeunesse qui interviendront. On peut dès lors mesurer l'importance des responsabilités qui lui sont confiées. À cet égard, je considère que,dans la mesure des ses moyens, il accomplit une tâche colossale, trop souvent mal perçue par les citoyens. Si je donne ainsi mon opinion, c'est que je suis témoin tous les jours des efforts déployés par les professionnels de la DPJ qui agissent sur la ligne de feu, loin du décorum de la cour et parfois sans la collaboration des parents. Ils sont le plus souvent débordés dans leur charge de travail, mais de façon fortement majoritaire, ils remplissent leurs fonctions de manière professionnelle, pour ne pas dire avec l'âme d'un missionnaire.
C'est sans aucune hésitation que je conclus que le rôle du Directeur de la protection de la jeunesse est essentiel et que toutes les ressources nécessaires à l'accomplissement de son mandat doivent lui être consenties.

MPLV.com : Pourriez-vous comparer notre système de justice s'appliquant aux jeunes avec celui d'autres pays?
Sans être un spécialiste ayant une connaissance complète des différents systèmes à travers le monde, je puis affirmer que le système québécois fait l'envie de plusieurs pays, à telle enseigne que tant la DPJ que la magistrature québécoise apportent leur expertise pour l'amélioration du système de justice pénale de nombreux pays, plus particulièrement en Amérique du Sud.

Pour plus d'informations, consultez :



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Révisé mai 2007


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