Santé

Parce qu'un décès peut arriver

Bien des gens croient qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un testament avant d'être plus âgé. Pourtant, protéger sa famille veut également dire planifier les conséquences de son décès.

« Si nombre de gens ont peur de la mort, la mort ne craint personne. »
Pierre Dac

Situation # 1

Maria et Alain vivent en union de fait depuis 2 ans maintenant. Ils ont une petite fille, Élodie, 1 an. Alain a également un fils, Éric, 5 ans, qui est né de son mariage avec Julie, de qui il n’est toujours pas légalement divorcé. Ni Maria, ni Alain n’ont procédé à la rédaction d’un testament croyant qu’ils sont bien trop jeunes pour penser à la mort… De toute façon, ils sont d’avis que si l’un d’eux décède, les biens du défunt devront être transmis au survivant. Par ailleurs, Maria et Alain détiennent chacun 50 % de leur résidence familiale. Malheureusement, comme un décès ne se prévoit pas, Alain est victime d’une crise cardiaque et décède peu après.

C’est le Code civil du Québec qui décide

Le fait de dire à quelqu’un qu’on lui laisse nos biens advenant notre décès n’a aucune valeur si ce n’est pas constaté dans un testament écrit et ce, peu importe la valeur des biens en question. En effet, au Québec, lorsqu’une personne décède sans avoir rédigé de testament, c’est le Code civil du Québec qui détermine qui sont les héritiers du défunt et quelle est la part de chacun dans la succession, et ce, peu importe les volontés non écrites du défunt.

De plus, malgré la croyance populaire, leCode civil du Québec exclut le conjoint de fait du défunt comme héritier … et ce peu importe la période pendant laquelle il a fait vie commune avec le défunt, peu importe que ces conjoints de fait étaient, avant le décès de l’un d’eux, considérés comme des conjoints au sens fiscal et peu importe qu’ils aient ou non des enfants issus de leur union de fait. Ainsi, Maria ne serait pas héritière de la succession de Alain mais il y a pire, comme Alain n’était pas encore divorcé de Julie au moment de son décès, cette dernière ferait partie de ses héritiers.

En effet, lorsqu’une personne décède sans testament et qu’elle a un conjoint (légalement marié ou uni civilement en vertu des règles de l’union civile prévues au Code civil du Québec) ainsi que des enfants, la succession sera dévolue pour 1/3 au conjoint, et pour 2/3 en faveur des enfants, en parts égales entre eux. Dans cette situation, chacun de Julie, Éric et Élodie hériterait de 1/3 de la succession.

Enfin, le comble de la situation serait certainement que Maria se retrouverait copropriétaire de sa résidence familiale avec les héritiers de Alain, soit Julie, Éric et Élodie.

Administration par les enfants à compter de 18 ans

Les biens de la succession de Alain qui seraient dévolus en faveur de chacun de Élodie et Éric seraient administrés par leur tuteur respectif pendant leur minorité, c’est-à-dire par Maria en ce qui concerne les biens dévolus à Élodie et par Julie en ce qui concerne les biens dévolus à Éric. Cependant, il faut savoir que dès que l’un d’eux atteindra 18 ans, lui seul pourra administrer ses biens … et les dépenser à sa guise!

Si Alain avait eu un testament, il aurait pu y prévoir que les biens légués à ses enfants mineurs seraient soumis à l’administration prolongée du liquidateur de sa succession. Cela signifie que Alain aurait pu prévoir dans un testament que le liquidateur de sa succession administrera les biens léguées à chacun de ses enfants pour le bénéfice de l’enfant concerné et qu’il remettra ces biens à ses enfants en plusieurs tranches (par exemple, il pourrait être prévu que le liquidateur devra remettre la moitié du capital de la part de l’enfant lorsque ce dernier atteint 21 ans et que le solde de sa part lui sera remis lorsqu’il atteindra 25 ans). De cette manière, on peut retarder le moment où les biens sont remis à un enfant et éviter que l’enfant dilapide son héritage.

Il est également possible dans un testament de prévoir que des biens sont légués en faveur d’une fiducie pour le bénéfice d’un enfant ou d’un conjoint, plutôt que de léguer des biens en pleine propriété. Il faut cependant savoir que la création de fiducies est habituellement avantageuse lorsque l’ampleur du patrimoine le justifie, ce qui peut permettre la réalisation d’économies d’impôts non négligeables.

Avis au Curateur Public

Par ailleurs, lorsque des biens d’une valeur supérieure à 25 000 $ sont dévolus en faveur d’un enfant mineur en raison d’un décès, le Code civil du Québec exige entre autre que le liquidateur de la succession effectue une déclaration à cet effet au Curateur public. De plus, dans de telles circonstances, le tuteur de l’enfant mineur sera assujetti à plusieurs autres procédures. Notamment, le tuteur à l’enfant mineur devra, au préalable, être autorisé par le tribunal afin de vendre un immeuble appartenant à un enfant mineur et dont la valeur est supérieure à 25 000 $. Dans le cas étudié, il est possible que Maria et Julie doivent s’adresser au tribunal afin d’autoriser la vente de la part de la résidence familiale dévolue à chacun de Éric et Élodie en faveur de Maria.

Liquidateur de la succession

Un autre élément à ne pas négliger est que sans testament, il est impossible de désigner le liquidateur de notre succession, c’est-à-dire la personne qui procèdera au règlement de notre succession. Ainsi, le Code civil du Québec prévoit qu’à défaut de désignation de liquidateur, les héritiers du défunt sont de plein droit les liquidateurs. Dans le cas de Alain, cela signifie que la seule liquidatrice de sa succession sera Julie étant donné que les enfants de Alain, Éric et Élodie, sont mineurs et donc incapables d’occuper cette fonction. Maria ne pourra donc pas participer aux décisions concernant le règlement de la succession de son conjoint de fait!

Situation # 2

Laure et Marc-André sont mariés depuis 5 ans sous le régime matrimonial de la séparation de biens. En effet, ils ont procédé, avant leur mariage, à la signature d’un contrat de mariage dans lequel il est prévu que le survivant d’eux recueillera les biens de son défunt époux (cette clause est communément appelée « au dernier vivant les biens »), ils n’ont pas rédigé de testament. Cependant, Laure et Marc-André sont victimes d’un grave accident de la route et décèdent tous deux sur le coup, sans qu’il ne soit possible de déterminer qui d’entre eux est décédé le premier. Ils avaient une fille de 3 ans, Amélie.

Avoir un contrat de mariage prévoyant la clause « au dernier vivant les biens » n’est pas suffisant dans ces circonstances, puisqu’il est impossible d’appliquer cette clause, Laure et Marc-André étant décédés sans qu’il soit possible de déterminer qui est décédé en premier. Les biens de Laure et Marc-André seront donc dévolus selon les règles du Code civil du Québec, soit en totalité à Amélie 3 ans.

Alors, comme il est mentionné ci-dessus, Amélie pourra administrer seule les biens qui lui seront dévolus dès son 18e anniversaire. De plus, si la valeur des biens qui lui sont dévolus en raison du décès de sa mère ou de son père est supérieure à 25 000 $, le Curateur Public devra en être informé et plusieurs formalités devront être suivies par le tuteur de Amélie.

Nomination du tuteur

Comme les 2 tuteurs légaux de Amélie, son père et sa mère, sont décédés, une personne devra être nommée pour les remplacer. En effet, contrairement au testament, il n’est pas possible de nommer dans un contrat de mariage la personne qui nous remplacera à titre de tuteur pour nos enfants. Un contrat de mariage n’est donc pas suffisant.

Ainsi, concernant la nomination du tuteur de Amélie, il faut savoir qu’il devra y avoir convocation et tenue d’une assemblée de parents, alliés ou amis, lesquelles personnes devront en règle générale, désigner 3 personnes qui formeront le conseil de tutelle de Amélie. Par la suite, un recours devant le tribunal sera nécessaire afin d’obtenir la nomination d’un tuteur pour Amélie, sur avis du conseil de tutelle.

Liquidateur de la succession

De la même façon, il est impossible de nommer la personne qui agira à titre de liquidateur de notre succession dans un contrat de mariage, le testament est donc également indispensable à cet égard. Tel que mentionné ci-dessus, à défaut de nomination du liquidateur de la succession, les héritiers sont de plein droit liquidateurs de la succession. Cependant, comme la seule héritière est mineure, un problème se pose. En effet, en vertu du droit actuel, 2 positions s’opposent dans ces circonstances. La première, est qu’un recours devant le tribunal est nécessaire afin d’obtenir la nomination d’un liquidateur de la succession, tandis que la seconde est que le tuteur de l’enfant mineur peut procéder lui-même à la nomination d’un liquidateur. Bien entendu, pour plus de sécurité et pour éviter les contestations, le recours devant le tribunal pourrait être préférable même s’il peut entraîner des coûts et délais importants.

Les différents types de testaments

Les situations exposées ci-dessus avaient pour but de démontrer que le testament est un acte essentiel à la protection des intérêts de toute la famille et qu’un contrat de mariage ne suffit pas, malgré la croyance populaire. De multiples autres situations et raisons démontrant l’importance d’un testament auraient pu être mentionnées. Mais quels sont les différents types de testaments permis au Québec et quelles sont leurs principales formalités?

Tout d’abord, la forme de testament la plus simple est sans contredit le testament olographe. Pour être valide, il doit être écrit entièrement par le testateur et être signé par lui. Ce testament a l’avantage d’être facile à effectuer et simple à modifier. Cependant, il faut savoir que ce type de testament peut être difficile à trouver par les héritiers, peut être facilement contesté et que suite au décès, il devra être soumis à la vérification du tribunal, ce qui entraînera certains coûts et délais…

Il est également possible d’effectuer un testament devant témoins. Brièvement, lors de la signature d’un tel testament, le testateur doit déclarer, en présence de 2 témoins que le document en question est son testament mais, il n’a pas à en divulguer le contenu. En ce qui concerne les signatures, bien entendu, le testateur doit signer son testament et les 2 témoins doivent aussitôt signer le testament en présence du testateur. Par ailleurs, si le testament n’a pas été écrit par le testateur, le testateur ainsi que les témoins doivent signer ou apposer leurs initiales sur chacune des pages du testament. Ce testament est moins contestable qu’un testament olographe en raison de la présence des 2 témoins. Cependant, un testament fait devant témoins devra également être soumis à la vérification par le tribunal suite au décès.

Enfin, la troisième et dernière forme de testament est le testament notarié. De façon générale, un tel testament doit notamment respecter les formalités suivantes :

  • il est fait et reçu par un notaire assisté de 1 témoin;
  • il porte le lieu et la date où il est reçu;
  • il est lu par le notaire avec ou sans la présence du témoin;
  • il est signé par le testateur, le témoin et le notaire en présence les uns des autres.

Bien que plusieurs formalités doivent être respectées, le testament notarié est sans contredit la forme de testament la plus sécuritaire. En effet, l’original du testament est conservé par le notaire et il peut en émettre autant de copies que désiré au testateur, le testament est inscrit au registre de la Chambre des notaires du Québec (il est donc facile à retracer lors d’un décès), le notaire ne peut dévoiler le contenu du testament avant le décès mais surtout, il est très difficile d’attaquer un testament notarié en justice et il n’a pas à être soumis à la vérification par le tribunal suite au décès. C’est ce qui explique pourquoi le testament notarié est la forme de testament la plus recommandée d’autant plus que le testateur pourra bénéficier des conseils d’un professionnel lors de la préparation de son testament ce qui pourra empêcher le testateur de faire des erreurs juridiques et pourra lui permettre de réaliser des économies d’impôts au décès. Sachez par ailleurs qu’il peut être parfois plus coûteux de faire vérifier un testament devant le tribunal suite au décès que de faire un testament notarié…

Revue de la planification testamentaire

Bref, un testament, c’est primordial. Cependant, nous vous rappelons qu’un testament n’est jamais fait « une bonne fois pour toute » ! Une personne devrait procéder à la revue de sa planification testamentaire périodiquement et plus particulièrement, lors de la naissance d’un enfant, du décès d’un membre de sa famille proche, d’une séparation ou d’un divorce, d’un mariage ou du début d’une union et lors de la modification significative de sa situation financière.

Alors qu’attendez vous pour faire votre testament ?

Isabelle Fecteau
Notaire

Me Isabelle Fecteau pratique la profession de notaire fiscaliste au sein de l’étude Chagnon Vocelle Fecteau, notaires. La rédaction de testaments et de mandats en prévision de l’inaptitude ainsi que le règlement de successions font plus particulièrement partie de ses champs d’expertise. Depuis 2001, elle enseigne également les aspects fiscaux de la pratique notariale aux étudiants du diplôme de droit notarial de l’Université de Montréal. CHAGNON VOCELLE FECTEAU NOTAIRES, S.E.N.C. 606, rue Cathcart Bureau 300 Montréal (Québec) H3B 1K9 Tél: (514) 908-1700 Courriel : if@chagnonvocelle.ca


Cette semaine
Les mots de Passe-Partout : pour apprendre en s’amusant

Cette émission jeunesse a marqué plus d’une génération, nous sommes nombreux à avoir grandi en compagnie de Passe-Montagne, Passe-Carreau et Passe-Partout.

20 cabanes à sucre familiales

Puisque le goût de l’érable coule dans nos veines, allons s’en pourlécher les babines encore cette année! Voici des suggestions de cabanes à sucre dans toutes les régions du Québec.

Le RQAP : plus flexible que jamais

Présenté par le Gouvernement du Québec.

Saviez-vous que le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) vous permet de concilier encore plus facilement vos responsabilités familiales et professionnelles? 
 

Sarah-Jeanne Labrosse raffole de ces produits pour bébé

Dans un monde où la peau délicate des tout-petits demande une attention particulière, les soins Mustela émergent comme un phare de confiance offrant des produits qui évoquent la tendresse et le réconfort d’un câlin.