Pour Malorie, trois ans, la venue imminente d’un autre enfant dans la famille est un événement… bouleversant. Habituée à parler couramment, la fillette s’est mise à bégayer, elle qui avait toujours été un moulin à paroles bien compréhensible! Pour Étienne, habitude ou manie, il mordille une couverture avant de s’endormir ou quand il est gêné. Marianne peut aller 3 fois à la salle de bain avant que sa mère quitte la garderie avant d’aller au travail. En préparation de la rentrée scolaire, Thomas dort moins bien qu’avant et les cauchemars se succèdent. Pour Léonie, pas question de se séparer de sa poupée Rosie pour rien au monde. Maélie s’obstine à vouloir attacher seule ses souliers, mais pique des colères incroyables si elle n’y arrive pas parfaitement. Ces enfants sont de petites victimes du stress. Sans aller jusqu’à ruiner leur vie, le stress génère chez eux des réactions différentes. Après avoir noté la source du stress, les parents doivent aider leur enfant à trouver une façon de réduire le stress et des moyens d’y faire face plus sainement. Et ce, de différentes façons. Portrait du stress chez les enfants.
Dans la société plutôt hyperactive, les sources de stress sont nombreuses et variées. D’autant plus que personne – pas plus les enfants – y réagit de la même façon! Ce qui peut être un agent stresseur pour un petit ne l’est pas nécessairement pour un autre. Toutefois, une chose est claire et un spécialiste en matière de stress à l'Université York, Harold Minden, le réitère : le stress peut nuire au bien-être physique, affectif, social, intellectuel et au rendement scolaire des enfants.
Sources de stress
Les adultes ont tendance à minimiser ou à banaliser certaines situations ou des événements pouvant générer du stress chez les enfants, sans réellement s’en rendre compte. Les chercheurs s’entendent : pour qu’une situation soit stressante, elle doit comporter au moins l’une des trois conditions suivantes :
- nouvelle
- imprévisible
- absence de contrôle (la personne a l’impression de ne pas avoir de contrôle sur la situation)
Voici quelques situations qui peuvent générer du stress chez votre enfant :
- Milieu familial instable où les cris et les chicanes dominent;
- Discipline trop rigide ou à l’inverse trop de responsabilités pour un enfant;
- Difficulté à se faire des amis;
- Intimidation;
- Déménagement;
- Arrivée d’un bébé dans la famille;
- Décès d’un proche;
- Séparation des parents ou des grands-parents;
Manifestations possibles
Le Dr. Harold Minden mentionne effectivement que le stress peut avoir différents impacts dans la vie de l’enfant. Le stress peut influer sur la motivation, l'attention, la perception, la mémoire et le processus d'apprentissage des enfants. Aussi, la vie de famille sera altérée. Comme une roue qui tourne, un enfant stressé ou anxieux – au même titre qu’un parent qui l’est – influencera l’ambiance générale dans la maison.
D’abord, les parents sont les principaux « détectives » qui notent des changements dans l’attitude et le comportement de l’enfant. En effet, un état d’agitation nous surprend davantage si habituellement notre enfant est de nature calme et posée. Inversement, un enfant désormais léthargique alors qu’il a habituellement plein de projets nous inquiète autant. C’est le changement qui est le signal d’alarme.
- Apathie
- Crises, irritabilité, colère, etc.
- Pleurs
- Tristesse
- État de panique, anxiété, angoisse
- Difficulté à dormir, sommeil peu réparateur ou agité
- Douleur (mal de tête, maux de ventre, etc.)
- Perte d’appétit
- Silence
- Habitudes nerveuses (ronger les ongles, sucer le pouce, se gratte, etc.)
- Pas de désir de participer à des activités, léthargie
- Régression
- Peu de contacts avec d’autres enfants ou contacts difficiles
Gestion du stress
Plusieurs études le notent clairement : les acteurs les plus importants pour gérer le stress des enfants sont les parents. Devant des enfants anxieux ou stressés, c’est aussi à eux de réagir. Les petits ne comprennent pas vraiment ce qui s’opère en eux. Marie Bérubé, psychologue, écrit sur le sujet dans son site Oserchanger.com : « Nous devons également nous rappeler que la plupart des enfants manquent de moyens pour faire de l’ordre et relativiser leurs sentiments. » En effet, elle rappelle que le petit enfant (0-6 ans) ne peut ni analyser, ni formuler de plans stratégiques. Seul l’adulte peut le protéger du stress. Le succès dépend donc de l’habileté de l’adulte à reconnaître les signes, à identifier le problème, à écouter, à faire verbaliser, à supporter, à rassurer, à serrer dans ses bras et à démontrer son affection. »
Alors, il faut trouver la source du stress (conflit à la garderie avec un copain, peur de la séparation, peur de perdre sa place dans la famille, etc.) et ensuite établir une stratégie pour calmer les angoisses de notre enfant. N’oubliez pas que si la source du stress est à la garderie, il vous faut travailler de concert avec l’éducatrice ou les autres intervenants. Développez des pistes pour désamorcer les crises ou les situations stressantes. Parfois, de petits changements (aller reconduire l’enfant à la garderie après avoir pris 10 minutes pour jouer à un jeu) peuvent avoir de gros impacts pour l’enfant.
- La psychologue Sonia Lupien de l’hôpital de Douglas mentionne que lorsque les parents agissent de manière à diminuer la nouveauté et l’imprévisibilité chez leurs enfants, ils peuvent augmenter le sens du contrôle chez ce dernier, et par extension diminuer son stress.
- Aidez votre enfant à verbaliser ses émotions : « Je me sens… », « C’est comme quand je fais… », « Je me sens comme cela quand… », etc.
- Répondre à ses questions.
- Écoutez votre enfant sans finir ses phrases à sa place.
- Écoutez-le sans le juger et sans minimiser ses émotions.
- Serrez-le dans vos bras ou établissez un contact physique. Ceci permet à l’enfant de se détendre et renforce son estime de lui. On lui montre que c’est important pour nous aussi.
- Aidez-le à trouver des moyens de se détendre. Suggérez-lui des pistes s’il ne sait pas quoi faire. Demandez-lui de choisir ce qui lui plairait et l’accompagner dans sa démarche.
- Bougez avec lui ou permettez-lui de faire du sport. L’activité physique permet d’évacuer les tensions. Établissez au moins un moment par jour où l’enfant peut « dépenser » son énergie.
- Essayez de rire plus en famille. L’humour permet de dédramatiser plusieurs situations.
- Trouvez des activités relaxantes (bain, jeu de société calme, lecture, dessin, etc.) à faire avant le dodo ou pendant la journée. L’équilibre entre activités physiques et relaxantes peut être la clé pour une plus grande stabilité affective.
- Établissez une routine sécurisante (rituel entourant le dodo, le retour de la garderie, etc.) et essayez de la maintenir sans qu’elle devienne un cadre trop rigide. Soyez flexible à l’intérieur de cette routine. Mais rappelez-vous qu’une routine sécurise beaucoup les petits.
- Accordez-vous des moments de « folies » où on se fait plaisir. Retrouvez le plaisir en vous amusant en famille. Laissez-vous aller!
- Mangez bien! De bons aliments aident le corps et l’esprit à être en pleine forme.
En demandons-nous trop à nos enfants?
Sommes-nous parfois, en tant que parents, des générateurs de stress pour nos propres enfants? Voilà une question qui mérite attention. En demandons-nous trop à nos enfants? Dès 5 ans, des enfants se présentent à des tests de classement pour la maternelle dans une école à vocation particulière? Pour faire partie d’une équipe de sport d’un niveau supérieur, on pousse les enfants à donner le meilleur de lui? Mais est-il raisonnable d’encourager – trop? – les enfants? Où est la limite entre ce qui est sain et ce qu’il ne l’est plus?
Le stress de la performance est insidieux, car il naît, entre autres, d’une « bonne intention » qui ensuite prend des proportions exagérées. Dre Sylvie Bergeron, pédiatre urgentologue à l’Hôpital Ste-Justine, l’expliquait ainsi dans le bulletin de L'Association canadienne pour la santé mentale : « Les parents poussent parfois leurs enfants vers une activité qu’eux-mêmes ont toujours rêvé de pratiquer, sans se rendre compte que leurs petits ne partagent pas leurs goûts. Ça prend parfois plusieurs visites chez le médecin avant de faire le lien entre des douleurs abdominales graves chez un enfant et le fait qu’il n’accepte de jouer au hockey que pour faire plaisir à papa. »
Étonnament, on note qu’environ 50 à 75 % des enfants d’âge scolaire vivent des problèmes de stress. L’entrée à l’école peut devenir une source d’angoisse. Habitué d’être largement félicité et encouragé par ses parents et son entourage, l’enfant vit ses premières expériences de compétition. Il se rend compte que son dessin ou ses idées ne sont pas toujours les meilleurs. Stress et angoisse à l’horizon!
Les lundis sont des journées plus difficiles et plus stressantes pour les enfants qui retournent à la garderie après un week-end (2 grandes journées!) avec leurs parents. Soyez plus attentifs les lundis… et toute la semaine ira mieux.