Non, elle n’est pas toujours inutile, oui, elle comporte quelques bénéfices. Lorsqu’elle est pratiquée chez des enfants âgés de plus de deux ans, la circoncision, qui est l’extraction du prépuce, peut être pertinente au plan médical pour deux raisons. D’abord, explique Dr Dickens Saint-Vil, chirurgien pédiatrique et directeur du programme de chirurgie pédiatrique à l’Hôpital Ste-Justine, « Elle peut l’être chez les enfants qui ont un problème au niveau du prépuce, comme le phimosis (une ouverture étroite du prépuce en raison d’infections répétées). Ou pour ceux qui ont des infections urinaires à répétition ».
Pourquoi la circoncision?
Chez les poupons de moins de huit semaines, la circoncision est pratiquée uniquement pour des motifs personnels et religieux, et sous anesthésie locale. Dans les hôpitaux pour enfants, on ne circoncit pas les bébés entre l’âge de huit semaines et deux ans, car l’opération devrait alors se dérouler sous anesthésie générale et celle-ci comporte des risques pour les enfants de moins de deux ans, signale Dr Saint-Vil.
Lorsque le souhait des parents de soumettre leur enfant à cette chirurgie repose sur des raisons personnelles, celles-ci sont généralement de nature religieuse. « Cela se fait par exemple chez les musulmans et les juifs entre autres soit par conviction religieuse, soit parce qu'ils croient qu’il sera plus facile de s’occuper de l’hygiène du bébé s’il est circoncis, ou alors simplement parce que le père est lui-même circoncis », explique Dr Saint-Vil. Le coût de l’intervention qui n’est alors pas couvert par le régime d’assurance-maladie du Québec peut grimper jusqu’à 1 800 $. Lorsque la circoncision est pratiquée pour une raison médicale, on doit débourser 250 $.
Comme le Québec – la région métropolitaine particulièrement – compte de plus en plus de membres de communautés culturelles diverses, le nombre de bébés, de garçons et de jeunes hommes circoncis a grimpé considérablement au cours des dernières années.
L’opération et les soins postopératoires
Pratiquée chez les nouveau-nés, la circoncision est une opération d’une durée d’une vingtaine de minutes; après avoir immobilisé le bébé et injecté une substance anesthésiante en périphérie de son pénis, on place un anneau de plastique en forme de cloche autour du gland, sous le prépuce, après quoi on procède à la ligature du prépuce. On ne recourt pas à la « cloche » pour la circoncision des bambins de deux ans et plus; le chirurgien retire plutôt le prépuce et stoppe les saignements à l’aide de points. L’opération dure alors environ une heure.
Les nouveau-nés, tout autant que les jeunes enfants, ressentent de la douleur après la circoncision. L’acétaminophène (Tempra, Tylenol par exemple), de même que la crème EMLA peuvent atténuer celle-ci, mais pas totalement, du moins au cours des 48 premières heures suivant la chirurgie. Le frottement du gland sur la couche ou la petite culotte peut évidemment accentuer le mal, mais on peut appliquer de la crème Polysporin ou de la Vaseline pour soulager, recommande Dr Saint-Vil.
« Il ne faut pas mouiller le gland le premier jour après la chirurgie, ajoute-t-il. Il vaut mieux aussi ne pas faire de sport pour au moins deux semaines afin d’éviter les coups possibles ».
Les risques
Au Québec, la circoncision est pratiquée principalement dans les hôpitaux pédiatriques et les pédiatres des hôpitaux régionaux y ont parfois recours pour des raisons médicales.
Les parents peuvent toutefois faire circoncire leur nouveau-né dans des cliniques privées, où certains pédiatres possèdent une attestation de formation pour le recours à la méthode de la cloche. Comme les cliniques détiennent un permis de pratique qui leur confère le droit d’effectuer des traitements médicaux uniquement sous anesthésie locale, on n’y pratique pas la circoncision chez les enfants de plus de deux ans.
Toutefois, signale Dr Saint-Vil, la circoncision porte parfois, dans ces cliniques, la signature d’un pédiatre ou d’un médecin, ce qui accroît le risque de complications. Les parents devraient donc impérativement s’enquérir des compétences du médecin auquel ils s’apprêtent à confier leur enfant, souligne le chirurgien pédiatre. Lorsque les problèmes surviennent, les petits patients doivent souvent être transportés à l’Hôpital Ste-Justine.
La complication à laquelle les médecins font alors le plus souvent face est l’hémorragie. « Si l’enfant est amené rapidement, on peut la faire cesser. L’autre risque après une opération mal faite est le phimosis post-circoncision; il reste alors trop de muqueuse autour du gland et celle-ci finit par le recouvrir. Il y a aussi des brûlures possibles et il arrive parfois que l’on enlève trop de peau; il faut alors greffer de la peau », indique Dr Saint-Vil en précisant que ces incidents peuvent mener au décès.
Ces problèmes surviennent à la suite d’environ 5 % des circoncisions pratiquées au Québec. À Ste-Justine, l’intervention auprès d’au moins un bébé chaque mois nécessite une transfusion à la suite d’une hémorragie causée par la circoncision.
Des bénéfices remis en question
La circoncision réduit légèrement le risque de cancer du pénis à l’âge adulte; un homme circoncis sur un million reçoit ce diagnostic chaque année, alors que la proportion est de trois pour un million chez les hommes qui n’ont pas subi cette opération.
Certains médecins affirment que les hommes circoncis bénéficient d’une protection plus grande contre le SIDA. « Mon avis est qu’il y a de meilleures façons de se prémunir contre le SIDA… », répond Dr Saint-Vil.
Il n’est pas rare d’entendre ou de lire également le lien entre la circoncision et l’exacerbation des sensations lors de relations sexuelles; au dire du chirurgien pédiatrique, il s’agit d’un mythe. En fait, conclut-il, dans la balance avantages et inconvénients, les risques, la douleur et les complications possibles à la suite de la circoncision pèsent plus lourd que les bienfaits de cette délicate opération.
Les parents qui décident de ne pas la faire subir à leur poupon ou à leur petit garçon doivent tout de même soigner l’hygiène de son organe masculin, prévient Dr Saint-Vil. « Ils doivent également savoir qu’il est normal de ne pas être capable de rétracter la peau couvrant le gland avant que l’enfant ait atteint l’âge de deux ans. Il vaut mieux ne pas tenter de le faire tant qu’il n’aura pas neuf mois de vie. On peut ensuite faire une dilatation progressive, en essayant de descendre le prépuce », explique-t-il en précisant que le parent devrait généralement être en mesure de replacer la petite muqueuse vers l’âge de deux et demie. Et bien sûr, il faut nettoyer le gland régulièrement, à l’aide d’une débarbouillette.
